RDC/Foot, business et maffia : Comment la RTNC a été débarquée des productions de la CAF avec le concours de ses propres cadres

Après Goka Productions et d’autres agences nébuleuses, Chris Production était, jusqu’au match RDC-Soudan, le détenteur exclusif de la production de tous les matches CAF de la RDC, en ce compris ceux des Léopards et des clubs du pays. Des cadres de la RTNC avaient monté un narratif prétextant l’incapacité technique de la chaîne nationale pour faciliter la mise en piste des privés qui, depuis, les arrosent avec la manne des droits CAF.

Les amateurs du football sont encore tout retournés après la mauvaise qualité de la retransmission du match par lequel les Léopards de la RDC se sont qualifiés pour la phase finale de la prochaine coupe d’Afrique des nations après avoir disposé des soudanais, samedi dernier au Stade des Martyrs de Kinshasa. Images floues, multiples coupures et autres aspérités entravent encore la gorge, tandis que les récriminations sur la chaîne nationale, la RTNC, continuent de chauffer les réseaux.
Au moins à ce stade sait-on que le fait n’avait pas été de la responsabilité de la RTNC qui n’avait fait que reprendre le signal du diffuseur ayant acquis les droits pour ce faire. Même si, par moment, on a aperçu quelques images des à-côtés de la retransmission, juste pour boucher quelques-uns des nombreux trous offerts au public par le producteur autorisé détenant tous les droits de la Confédération africaine de football.

Chris Productions, le nébuleux producteur de la retransmission catastrophique
Et ce producteur n’est autre que Chris Productions, une agence appartenant au nommé Chris Ibanga, un ancien membre du comité de soutien (communément appelé « bureau ») de l’artiste musicien Werrason. De Chris Production, pas grand-chose à découvrir, sinon qu’il s’agirait manifestement d’une boîte opérant sous les radars, déjà du fait qu’il ne figure nulle part sur les registres du Guichet unique de création d’entreprise ni au journal officiel comme entreprise en bonne et due forme évoluant en RDC.
C’est pourtant cette fantomatique boîte qui détient aujourd’hui, en RDC, l’exclusivité des droits de production de tous les matches de la RDC concernant aussi bien l’équipe nationale que les clubs de ce pays. Des droits détenus au détriment de la RTNC, censée être la chaîne hôte qu’elle a été autre fois avant de se faire débarquer du fait principalement d’une diabolisation de ses propres cadres qui se font arroser à la faveur des gros sous qu’engrange le producteur tierce qu’ils ont aidé à obtenir les droits de la CAF.

La RTNC disqualifiée à cause d’un narratif négatif de ses propres cadres
L’enquête de Congo Guardian remonte aux années 2012, au sortir du Sommet de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), où la FAC, qui travaillait alors avec principalement les chaînes hôtes (chaînes publiques), va commencer à collaborer avec un privé dénommé Goka Productions qui, lui, va se faire damer le pion par d’autres privés amenés par le puissant président de la Fécofa d’alors, Constant Omari.
Ces noces de la CAF avec les privés ont été facilitées par un narratif parti du sein de la RTNC où des cadres des directions des infos sports et de la production ainsi que du département technique et logistique. Un narratif qui laissa entendre que la RTNC n’avait pas les capacités de produire les matches selon les exigences de la CAF sur le numérique en HD.
L’organisateur faitier du foot sur le continent va alors demander à la FECOFA de lui désigner un producteur local. C’est alors que les Goka Productions, à une certaine époque, et sa suite vont défiler avant que l’administration de Constant Omari ne mette en piste Chris Productions. Le coup est alors parrainé par le point focal de la CAF à Kinshasa et, côté Gouvernement, par Jolino Makele, alors Ministre d’Etat en charge de la communication et médias. Et à la RTNC, c’est feu Ernest Kabila qui officie.

C’était juste un problème de fusibles : 20 ampères utilisées au lieu de 60
Ce petit monde institutionnel va ainsi servir de parapluie à Chris Ibanga qui se la coule ainsi douce, arrosant à gauche et à droite ses différents bienfaiteurs. Jusqu’à l’incident du week-end dernier. Les techniciens proches de la situation parlent d’un problème d’alimentation en énergie électrique.
Le producteur aurait utilisé des fusibles de 20 ampères, largement en deçà pour cette production qui nécessitait trois fois plus. Ca déficit va alors affecter la qualité des images jusqu’à culminer avec la coupure du signal. La RTNC va tenter de suppléer pour boucher l’écran figé avec des images des montrant les tribunes (les seules qu’elle est autorisée à montrer) en lieu et place du match.
Le mal ainsi fait, les gens entreprennent de prendre la poudre d’escampette alors que la RTNC en prend plein la bouille. Des éclats de voix se font entendre dans les couloirs et la direction générale de la chaîne nationale décide d’en savoir le fin mot de l’affaire.
C’est alors qu’alerté par ses contacts internes, Chris Productions, à qui aucune question n’est encore posée et conscient de devoir répondre de cette situation, va prendre les devants et faire parvenir un dossier contenant des documents aussi bien du Ministère de la Communication et Médias que de la FÉCOFA lui accordant l’exclusivité de la production des matches de la CAF et de la Linafoot.
Dans la paperasse, aucune indication sur de quelconques capacités techniques, alors que ce producteur opère juste avec des faisceaux IP. Impensable dans un pays qui se distingue par une connexion internet instable.

Personne, curieusement, n’a, depuis toutes ces années, songé à le relever. Même pas le point focal de la CAF à Kinshasa.
Tout ceci se passe alors que la RTNC est, plus que jamais, montée en puissance au plan technologique comme l’a attesté la prise en charge, par elle, de la retransmission de l’ensemble des jeux de la Francophonie en relevant un défi majeur de couvrir simultanément onze sites d’activités.

Alors que les « chefs coutumiers » qui ont vécu de la manne de Chris Productions font profil bas, la question est à présent de réhabiliter la RTNC et, partant, la République. L’enjeu est que la FECOFA assume sa responsabilité et que la partie congolaise (RTNC) saisisse l’UAR (Union Africaine de Radiodiffusion) à Lagos pour faire valoir ses droits afin de mettre fin à cette maffia.

Des taupes de Chris Productions en action pour faire échec à la nouvelle dynamique
Des sources de Congo Guardian à la RTNC assurent que des essais techniques effectués ces derniers jours sont plutôt concluants et que la CAF, par ses services techniques, apporte son concours pour améliorer davantage le signal.
Tout l’enjeu reste de savoir ce qu’il va advenir du contrat de Chris Production avec la CAF. En novembre prochain débutent les éliminatoires pour la coupe du monde alors que le contrat de Chris Production coure jusqu’en 2024 ! Il faut souligner, en effet, qu’il s’agit ici d’une affaire de gros sous avec la manne publicitaire et les droits de retransmission qui se vendent à prix d’or.
Ceci justifiant certainement cela, les sources perspicaces de Congo Guardian confient que Chris Productions est assuré des services d’une taupe, cadre technique à la RTNC, qui a l’avantage d’assister, jusque-là, à toutes les réunions de crise depuis samedi dernier. Un œil et une oreille stratégiques pour lui permettre de peaufiner ses stratégies en ayant un coup d’avance.
Dossier à suivre.

Albert Osako

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