RDC/business, trafic politique et maffia : Comment Pascal Beveraggi brassait des capitaux avec lui-même sur le dos de pigeons

Nouvelles lumières sur les activités de Pascal Beveraggi et sa société Octavia en République démocratique du Congo. C’est ce que l’on retient des révélations apportées par notre confrère en ligne « Africa Intelligence » dans son dossier digne d’un « BeveraggiLeaks » au sujet du conflit qui oppose ce trader français à Moïse Katumbi à travers sa firme Astalia.
Dans un enchevêtrement de manœuvres parti de son rachat de la compagnie de transport MCK Tricks auprès du grabataire Nécotrans, disparu depuis, Pasdcal Beveraggi est, en effet, parvenu à se positionner dans les mines congolaises dans un parcours particulièrement douteux quant à la régularité des actes. Surtout lorsque ceux-ci ont systématiquement transité par des paradis fiscaux ou des sociétés écrans, mais surtout à travers des simulacres de paiement qui ne visaient qu’à flouer ses partenaires dans le but d’amasser des acquisitions à moindre coût.
Dans son dossier paru le 4 septembre dernier sur son site, le confrère Afrika Intelligence épluche une documentation constituée de centaines de pièces qui permettent de reconstituer le puzzle qui perce au jour les méthodes mafieuses du trader français dont les méthodes sont allées jusqu’à le mettre en porte-à-faux avec son avocate qu’il avait voulu également flouer pour ses honoraires.

De la kabilie à la tshisekedie, les parapluies politiques pour un affairisme maffieux
Tout part de la première acquisition de Beveraggi en 2017 auprès du groupe de droit français Nécotrans qui est en train de mettre la clé sous le paillasson. Pour le coup, il met en piste sa société dubaïote Octavia Limited qui réalise l’opération pour une bouchée de pain auprès du Tribunal de commerce de Paris.
MCK Trucks, qui est une société de droit congolais, passe donc en transaction à Paris où son acquéreur le rebaptise au nom de NB Mining.
Seulement, Pascal Beveraggi semble jouer à la courte paille, car, de l’autre côté, Moïse KATUMBI, le vendeur, n’a jamais vu la totalité du montant de la transaction sur MCK Trucks au profit de Necotrans. C’est le début d’une saga digne d’une maffia financière qui va se jouer en mode saute-mouton en allant de tribunaux en tribunaux, et de pays en pays dans le but manifeste de brouiller les pistes et avoir la partie adverse à l’usure.
Ayant ainsi choisi les voies chaotiques pour mener ses affaires, Padcal Beveraggi va tôt faire de rallier des lobbies politiques congolais. Il se fraie une place dans le pré-carré kabiliste sous le mandat de Joseph Kabila durant lequel on parle de John Numbi comme son principal parapluie.
Un choix stratégique par lequel il va pouvoir exploiter les profondes divergences qui vont diviser Katumbi avec son ancienne famille politique. Alors que l’ancien Gouverneur du Katanga gagne l’opposition, Beveraggi parvient, grâce à ses nouveaux amis kabilistes, à avoir des coudées plus franches, notamment après sa première déconvenue judiciaire par l’invalidation, par la justice française, du rachat de MCK Trucks.
Roublard, Pascal Beveraggi va rééditer, autour de 2022, sa même tactique politique en approchant, cette fois-ci, la famille politique tshisekediste. Comme sous Kabila, il profite de la rupture entre katumbi – qui rejoint de nouveau l’opposition – et l’Union sacrée. Ici, le français est particulièrement le bienvenu puisqu’il apporte ses démêlés avec Katumbi comme une supposée estocade qui, estime-t-on dans la tshisekedie, devrait pouvoir mettre hors course cet adversaire à la présidentielle, particulièrement redouté à cause de sa puissance financière.

Le challenge est plutôt délicat pour l’ancien gouverneur qui voit se jouer plusieurs dizaines de millions de dollars d’actifs recensés ainsi que sa réputation politique par rapport à un passé encombrant.

Multiplication d’entreprises suspectes pour des transactions à bénéficiaire unique : Pascal Beveraggi

Il faut marquer un arrêt de compréhension pour rappeler qu’au moment où Pascal Beveraggi la reprend, MCK Trucks est une entreprise autrefois florissante mais qui a périclité. A partir de 2016, son acquéreur français se constitue une constellation de petites sociétés dont il détient tout ou partie des actions. Ces unités sont disséminées entre la RDC, la Guinée et les Emirats Arabes Unis.
Avec ces boîtes aux profils et aux activités douteuses, Beveraggi va établir des partenariats de service avec NB Mining à des coûts suspects qui tournent autour de dizaines de millions de dollars. L’enquête d’Afrika Intelligence cite, entre autres, Gulu General Trading, enregistrée à Dubaï et qui n’a, pour seul actionnaire, que Pascal BEVERAGGI.
A elle seule, Gulu General Trading affiche, entre mai et novembre 2016, 11 encaisses de la part de NB Mining (ex- MCK Trucks) pour une bagatelle de 4,5 millions de dollars avec des libellés à faire tomber des nus. Les docuements des transactions mentionnent, sans détails, des « factures », des « consultance », des « assistance » ou encore « ingénierie technique » non retraçables nulle part.
C’est pourtant dans cette opacité et l’impossibilité de donner le vrai visage à toutes ces transactions que s’intensifie ce recours à des entreprises tierces appartenant toutes à pascal BEVERAGGI. En clair, le français fait commerce avec lui-même à travers des opérations qui s’apparentent au blanchiment des capitaux.
Mais ces opérations ne prospèrent pas toujours sous le régime de l’impunité dont jouit le français avec ses nouveaux amis politiques. Comme en septembre 2022 quand le parquet de Lubumbashi a sollicité l’expertise du cabinet MKM Consulting pour élucider les factures adressées par NB Mining à son Conseil, l’Avocate Congolaise Dorothée Madiya Mwamba.

Me Dorothée Madiya victime d’une opération de blanchiment de capitaux sur son nom
En effet, un audit des livres de NB Mining révèle que cette dernière aurait réglé pour, près de 10,9 millions de dollars les prestations de l’avocate entre 2016 et 2017. C’est sur base de ces écritures que les vérificateurs de la Direction Générale des Impôts (DGI) vont, en 2021, réclamer à l’Avocate la TVA sur ces paiements.
Un pactole qui fait frissonner Dorothée Madiya qui s’est vue opposer 39 factures en sa faveur sur les 89 répertoriées dans les livres de NB Mining. 39 factures qui représentent un peu plus de 9,9 millions de dollars qu’elle aurait empochés.
Les conclusions de l’expert requis par le parquet de Lubumbashi vont être sans appel et plutôt accablantes pour NB Mining : les 39 factures visés ne renvoient à aucun transfert bancaire en faveur de l’avocate. Plus encore, il s’avère que le modèle de factures utilisé avec ces 39 factures est un faux.

Comment Ecobank a servi de boite aux lettres pour faire rebondir des capitaux illicites sur le dos de Dorothée Madiya
Pa contre, l’expertise sur les 9,9 millions de dollars révèle qu’ils ont plutôt été décaissés en espèces par plusieurs chèques portant, toutes, la signature du Directeur Financier de la Société NB Mining auprès d’Ecobank. Un document interne à la banque révèle aussi que Laurent DUBOIS, le fameux directeur financier, a certifié que les fonds retirés au moyen de ces chèques étaient destinés au Cabinet de l’Avocate.
En réalité, révèle encore le cabinet MKM Consulting, « l’identité du Cabinet a servi de moyen technique et comptable pour retirer en toute sécurité les fonds qui ont été affectés à d’autres fins ».
Malgré toutes ces manœuvres illicites, NB Mining a fini par être placée en liquidation judiciaire en juin 2008 suite à une gestion chaotique qui lui a fait perdre plusieurs partenariats plutôt alléchants et qui ont fait péricliter son chiffre d’affaires.
Mais tel un chat qui a plusieurs vies, Pascal Beveraggi semble avoir plutôt tiré son épingle du jeu de ce revers, et certains observateurs se demandent si cette liquidation ne relève pas encore de ses tactiques affairistes. C’est, en tout cas, ce que l’on croit comprendre des révélations contenues dans une lettre datée de septembre 2018 et adressée aux Procureurs Généraux près la Cour de Cassation et la Cour d’Appel du Haut-Katanga par AJM & Associates, le Commissaire aux comptes de NB Mining.
L’objet de la correspondance se passe de tout équivoque : « révélation des faits délictueux ».
Dans cette lettre, le commissaire aux comptes révèle un remboursement, quelque mois avant le placement en liquidation judiciaire de NB Mining, d’une créance de plus ou moins 9,6 millions de dollars à la société Congo Global Opérations (CGO) qui se trouve être également une propriété de Pascal Beveraggi. Et ce n’est pas tout.
L’audit du Commissaire aux comptes révèle aussi que ce montant est de loin supérieur au chiffre d’affaires annuel de la société. Il révèle également que c’est plutôt CGO qui, selon les livres des deux sociétés, devait s’acquitter de ses factures auprès de NB Mining pour l’utilisation de ses engins sur la mine de Tilwezembe du Suisse Glencore via sa filiale Kamoto Copper Co (KCC).

Beveraggi se paie des prestations et se prête du matériel à lui-même
En français facile selon cette combine maffieuse, NB Mining prêté gracieusement ses équipements à une société tierce à qui elle a rajouté près de 10 millions de dollars.
C’est sous cette entourloupe que NB Mining va quitter la scène pour voir apparaître NB Mining Africa, une nouvelle unité sortie de l’imagination de Pascal Bevraggi pour poursuivre la sous-traitance minière.
Par cette nouvelle création, Beveraggi, intarissable dans ses magouilles, a réussi à circonvenir la justice en se faisant attribuer, par sa première firme Octavia Limied, l’ensemble des biens matériels de NB Mining à travers une décision du Tribunal de Commerce de Lubumbashi rendue peu avant peu avant la décision de liquidation.
Du grand art de l’entourloupe qui, en fait, n’est qu’un maillon d’une chaîne déjà construite dans un plan machiavélique où Beveraggi avait plusieurs coups d’avance et sur la justice qui croyait avoir à faire à plusieurs personnes alors qu’il ne s’agit que de la seule et même personnes de Beveraggi qui fait jouer ses ombres.
Dans l’ignorance totale, la justice congolaise a, en effet, restitués à Octavia Limited tous ses avoirs sur base d’une créance de 24 millions de dollars qu’elle détenait sur la Société NB Mining. Une dette qui, va encore révéler l’auditeur, est un autre tour de passe-passe comptable, qu’il qualifie de « totalement illégal et interdit par la loi » mais sorti tout droit de l’imagination si fertile de l’artiste Beveraggi.
Insatiable, Pascal Beveraggi va encore tirer profit de cette saisie-attribution par une facturation d’Octavia à NB Mining Africa de centaines de milliers de dollars.
Et sans remords, Pacal Beveraggi va reprendre – ou poursuivre, c’est selon – les affaires avec le nouveau NB Mining Africa. Ou plutôt reprendre les affaires avec lui-même puisque cette nouvelle firme est sa propre création.
Les locaux et autres biens matériels de NB Mining liquidée vont ainsi être confiés par Octavia à la nouvelle société à travers un contrat conclu en juillet 2018 pour un loyer mensuel de 50.000 USD. La Société NB Mining Africa va aussi se faire octroyer en location les machines et les engins de chantier sur un contrat de 200.000 USD par mois.
Ainsi se meut Pasal Beveraggi dans un environnement politique de totale impunité. Un environnement aux contours maffieux, selon cette démonstration des faits.
C’est aussi grâce à cet environnement que Pascal Beveraggi s’est payé des soutiens politiques solides contre Moïse Katumbi dans l’affaire qui les oppose à Lubumbashi. Les interférences politiques ont poussé le juge chargé du dossier, Laurent Batubenga Ilunga, à démissionner. Ilunga n’en pouvait plus des pressions et des menaces qu’il subissait, notamment de la part de Peter Kazadi qu’il avait nommément cité dans sa lettre de démission.
Le même Peter Kazadi qui est aujourd’hui Vice-premier ministre en charge de l’Intérieur.

A.O

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