Depuis 2017, la RDC produit des engrais dans une usine en partenariat public-privé installée à Boma, mais elle préfère exporter des devises pour acheter l’engrais à l’étranger au lieu d’attirer ces devises vers le Trésor public puisque cette usine de Boma vise aussi à exporter sa production.
Le Ministre de l’Agriculture a annoncé la réception imminente, par la RDC, d’une cargaison d’engrais de l’Office Chérufin du phosphate (Maroc). Le navire transportant cette cargaison se trouve déjà dans les eaux camerounaises et devrait atteindre les côtes maritimes congolaises sous peu.
Le compte-rendu du Conseil des ministres ne donne pas d’indication sur la quantité d’engrais attendue ni les conditions de leur obtention (don ou achat). Mais à la mi-juillet 2022, le Maroc avait annoncé la cession, par l’Office chérifien des phosphates (OCP), de 370 000 tonnes d’engrais à un prix réduit aux pays africains. L’annonce avait été faite le mercredi 20 juillet, Nada Elmajdoub, Vice-Présidente exécutive de la gestion de la performance du groupe en marge de la 14ème édition du Sommet des affaires USA-Afrique qui se tenait à Marrakech. L’objectif de cette initiative est d’alléger le fardeau financier causé par le renchérissement des prix des engrais sur le marché mondial suite au conflit russo-ukrainien.
La RDC est pourtant productrice d’engrais
Cependant, la RDC, qui aurait souscrit à cette offre, semble avoir abandonné sa propre production locale pour des raisons inconnues alors qu’elle dispose de toute une unité de production d’engrais dans la ville de Boma au Kongo Central. C’est, en effet, depuis octobre 2013 que le Gouvernement congolais s’était associé à la firme sud-africaine Triomf Fertilizer pour mettre sur pied une usine de production d’engrais. Créée en 1968 par le millionnaire Louis Luyt, Triomf Fertilizer avait apporté 70% au capital de Usd 39 millions contre 30% de la partie gouvernementale dans ce partenariat public-privé pour l’exploitation des riches gisements de phosphate du Kongo Central.
Ainsi naquit la Triomf DRC, une société spécialisée dans la production d’engrais avec une usine basée à Boma. La première production d’engrais est intervenue en 2017 pour une projection de 140.000 T d’engrais à l’objectif 2015 et 500.000 en 2030. Un niveau de production qui laissait ouverte l’option de l’exportation.
Un cash-flow supplémentaire pour booster la production déjà effective
En attendant, Triomf DRC avait mis en place un réseau de distribution comportant au moins un dépôt par territoire, soit 145 au total. Mais lors d’une évaluation effectuée en 2021 par une délégation du FPI qui avait apporté un appui financier à ce projet, il s’était avéré que la société avait besoin d’un cash-flow supplémentaire pour l’achat à l’étranger de certains intrants entrant dans la production des engrais. Le FPI avait aussi décelé un déficit de gouvernance et recommandé des correctifs à ce sujet.
Outre ces problèmes, Triomf DRC éprouvait de sérieuses difficultés d’accès aux sites d’extraction du phosphate, notamment du côté de Lukula et de Tshela ; ainsi que d’alimentation de son usine en électricité.
La tête de Christo Grobler ferait bloquer Triomf DRC
Depuis lors, la société, qui avait posé tous ces problèmes aux actionnaires, est demeurée sans suite. Côté congolais, on parle de considérations politiques en raison du fait que le projet avait été monté sous Matata Ponyo et que la partie sud-africaine est représentée par un certain Christo Grobler, le même sujet sud-africain à la tête d’Africom, une autre société sud-africaine impliquée, elle, dans le projet du parc agroalimentaire de Bukangalonzo.
Des caprices politiciens et des calculs électoralistes auraient donc fait lever l’option d’exporter des devises pour l’achat d’engrais produits localement plutôt que de les faire affluer vers le Trésor public, car le projet d’engrais de Triomf DRC vise également l’exportation d’une partie de la production.
JEK