RDC/Les réalités de la campagne : 10$, le tarif pour le meeting de Fatshi à Bukavu

« mi nilipata yangu kumi alakini niko yangu mukini » (j’ai eu mes dix dollars, mais je préfère rester chez-moi). Témoignage courant, vendredi soir, des congolais de Bukavu dans les réseaux sociaux pendant le meeting du candidat N° 3.

Félix Tshisekedi s’est encore produit de nuit, cette fois-ci à Bukavu, capitale de la province du Sud-Kivu. Pour une heure de rassemblement, cela était plutôt périlleux, si pas seulement téméraire dans une ville au niveau d’alerte sécuritaire particulièrement relevé, comme partout ailleurs dans ce Kivu à la paix troublée depuis plus de deux décennies.

Hasard de calendrier ou choix délibéré, le candidat N° 3 n’en était pas à une production à ces heures indues, selon l’avis de certains observateurs. Dont certains y trouvent de plus en plus une parade pour éviter ou, tout au plus, atténuer les contrecoups des meetings qui se traduisent par des confrontations désolantes avec l’assistance. Comme lors du passage à la Mongala où les citoyens lui ont réclamé désespérément un seul WC public comme réalisation de son premier quinquennat finissant.

Pour le coup donc, les leaders relais du Président sortant ont dû batailler ferme afin que Bukavu ne soit pas un autre Mongala ou encore un autre Boma ou Matadi où le chef de l’Etat s’était fait réclamer, par exemple, le RAM. Conscients de tout cela certainement, ces leaders relais travaillaient depuis des jours… à grands renforts de miyens financiers. Nordbet Katintima, Vital Kemerhe, Bahati Lukwebo et d’autres, y compris le Gouverneur de province Théo Ngwabidje, n’ont pas regardé à leur fortune pour arracher une réussite du passage de leur champion dans leur fief coupe-gorge.

Car le Kivu en est vraiment une, de coupe-gorge. Le chef de l’Etat mettait, en effet, pieds à Bukavu alors que les forces armées régulières affrontaient, dans le Nord-Kivu voisin, les rebelles du M23 qui, quelques deux jours plus tôt, semblaient marquer de nouvelles avancées sur terrain.

Fallait-il donc s’assurer avant tout de la météo sécuritaire avant de se risquer devant la foule? Pas facile, en tout cas, d’évoluer sur un terrain aussi hostile, car le bilan le plus attendu ici est celui de la paix. Une paix des armes qui n’occulte pas celle politique dans cette province où l’autorité publique gouverne carrément par défi. Après avoir claqué la porte de l’AFDC de Bahati Lukwebo alors qu’il se faisait défenestrer par l’Assemblée provinciale, Théo Ngwabije était allé se réfugier dans les bras de l’UDPS, le parti présidentiel, qui, depuis, le protège envers et contre tous.

Normal donc que la foule frondeuse, malgré l’obscurité sur la mythique place de l’Indépendance, ne l’ait pas loupé par ce chant bien évocateur : « Ngwabidje mwizi » (Ngwabidje voleur).

Malgré l’heure tardive, il est tout de même resté un parterre du public pour la disputer avec la forêt des drapeaux dont le nombre a fini par dominer à mesure que le temps apssait. Un exploit, faut-il le dire, lorsque l’on se rend compte des efforts et des moyens déployés pour réussir la mobilisation et maintenir une présence du public depuis le matin jusqu’à ces heures-là. Des échanges bien animés ont jalonné cette journée dans les réseaux sociaux pour vivre. Comme dans ce célèbre groupe « Habari moto moto » sur whattsapp où, même pendant le meeting, les internautes ne cessaient de s’offrir comme témoins des moyens financiers mis en jeu pour ce meeting. « mi nilipata yangu kumi alakini niko yangu mukini » (j’ai eu mes dix dollars, mais je préfère rester chez-moi), pouvait-on lire régulièrement dans ces témoignages.

10$ est le pontant le plus avancé pour attirer les militants au meeting, soutiennent de nombreux internautes dont la plupart disent avoir préféré garder leurs logis ou rester au coin du bistrot du quartier. D’autres parlaient de 3.000, d’autres encore de 4.000 FC.

Ceux qui ont fait le déplacement, se sont ainsi offerts comme reporters, diffusant des séquences de vidéos de la manif’. Immortalisant au passage des militants lassés qui s’en vont pendant l’adresse de Tshisekedi, les drapeaux et drapelets déjà enroulés. Ou cet écran électronique géant où défilent les images de campagne de Moïse Katumbi.

Une vengeance particulière sur ce site hautement politique où, avant l’arrivée de Tshisekedi, des militants extrémistes et intolérants ont descendu et brûlé des affiches géantes du candidat N°3.

JDW

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