Mercenaires exhumés de Moïse Katumbi : Jean Louis Esambo au CNS face au devoir de sa conscience

En avril 2016, Jean Louis Esambo avait, avec Banyaku Luape, démissionné de la Cour Constitutionnelle en pleine plénière de renouvellement de son tiers pour ne pas cautionner sa mise au pas par le régime Kabila qui avait déjà réussi, en 2016, à faire repousser les élections de deux et maintenir Kabila au pouvoir au delà du délai constitutionnelle. Aujourd’hui, Esambo se retrouve dans un contexte similaire face à sa propre conscience dans un engrenage de manœuvres visant le même objectif, comme avec la résurgence de la vieille affaire des mercenaires de Katumbi qui ne vise qu’à mettre celui-ci hors jeu pour la présidentielle. Que va-t-ils faire ?


Nouveau spécial de Félix Tshisekedi en matière de sécurité, Jean Louis Esambo, l’éminentissime professeur de droit à l’Unikin, prend ses fonctions au Conseil National de Sécurité (CNS) à un moment bien délicat où vient d’être révélé une suspecte affaire d’exhumation d’un vieux dossier politico judiciaire remontant à sept années déjà. Il s’agit de l’affaire de présumés mercenaires américains que Moïse Katumbi aurait engagés en 2016, sous le régime de Kabila, pour renverser celui-ci.

L’affaire des mercenaires de Katumbi exhumée après l’échec du plan Salomon SK Della…
En effet, quelque deux semaines avant la nomination de Jean Louis Esambo qui remplace désormais François Beya, l’une des rares éminences grises du renseignement congolais parti dans des circonstances troublantes, l’intérimaire Jean Claude Bukasa, avait, par courrier, demandé au Procureur général près la Cour de cassation d’être «fixé» sur l’état du dossier ouvert en 2016 contre l’opposant, dans cette affaire de «mercenaires» concernant 400 anciens marines américains et des commandos sud-africains. Prétendant dans cette lettre que le dossier était encore pendant du fait que la fin d’exil de Katumbi sur décision du Président Kabila n’avait pas absout les faits qui lui étaient reprochés, alors que l’auditorat militaire avait classé le dossier sans suite en avril 2019, l’ex- spécial intermédiaire de Tshisekedi ne laissait pas moins traîner des intentions sous-jacents à l’encontre de l’opposant dont la candidature à la présidentielle qui, depuis l’annonce de sa candidature, ne cesse de faire l’objet d’entraves et de restrictions de ses droits et libertés.
Cette démarche de Bukasa a mis la puce à l’oreille pour laisser croire qu’il y aurait un lien avec le dossier de Salomon SK Della, le spécial de Katumbi qui est en détention et poursuivi pour les mêmes préventions que son mentor en 2016, entre autres l’atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat. Après une fouille, de fond en comble, de la vie de Kalonda, mais aussi de pans entiers de celle de Katumbi, la flicaille politique du régime n’a rien trouvé de consistant à se mettre sous la dent pour coincer ce concurrent gênant à la prochaine présidentielle.

Désormais aux côtés de Tshisekedi, Jean Louis Esambo retrouve son destin et sa conscience de justicier face aux mêmes dérives anti démocratiques que sous Kabila
C’est donc sur ces entrefaites que Jean Louis Esambo atterrit au mont Ngaliema dans un contexte fort troublant en ressemblance avec celui de sa démission de la Cour constitutionnelle en 2018. Deux contextes électoraux chargés par des manœuvres du pouvoir en place pour disqualifier un opposant, Moïse Katumbi, qui se trouve être le même aujourd’hui qu’hier.
Jean Louis Esambo se retrouve en posture de jouer aujourd’hui le même match qu’hier mais à un poste différent, tout en engageant, cependant, la même conscience qu’hier.
Il s’agit, concrètement, de savoir si cet éminent professeur – qui vient de baptiser un ouvrage de l’immense professeur de droit Mampuya Kanunka qui critique sévèrement les pratiques de la cour constitutionnelle -, va aujourd’hui avaler ce qu’il a vomi hier.
On rappelle, en effet, qu’en avril 2018, soit huit mois avant les élections qui conduiront à l’historique alternance au sommet de l’État , Jean Louis Esambo et son collègue Banyaku Luape démissionnaient de leurs fonctions de juges constitutionnelle en pleine plénière qui devait procéder au renouvellement du tiers de la composition de cette chambre haute.
Les deux juges avaient évoqué officiellement des convenances personnelles, mais la raison retenue alors était qu’ils avaient refusé de se rendre complices de la mise au pas de la Cour constitutionnelle par le régime Kabila en prévision des élections. En effet, les deux juges démissionnaires étaient déjà connus à l’époque comme étant réfractaires à certaines dérives.
Sous cette posture, c’est la mort dans l’âme qu’Esambo et Banyaku s’étaient retrouvés témoins et complices de l’avis de la Cour constitutionnelle qui, en 2016, avait fait repousser les élections et autorisé le maintien de Kabila au pouvoir au-delà du délai constitutionnelle de cinq ans.
Aujourd’hui donc, Jean Louis Esambo est littéralement rattrapé par son destin en se retrouvant dans une posture similaire avec la différence, cette fois-ci, qu’il aura une décision prépondérante sur tout ce qui se fera dans l’enjeu électoral en cours. Déjà avec le rappel suspect d’un dossier déjà clos, mais aussi par rapport à tout le dispositif de musèlement de l’opposition qui se trouve être justement ce que ne partage pas sa conscience.
Les observateurs l’observent désormais…
Jonas Eugène Kota

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