Enquête sur l’assassinat d’Okende : « Le Monde » révèle un laveur de voitures, témoin de l’enlèvement

Dans sa version en ligne, le journal français Le Monde apporte un nouvel élément d’éclairage dans l’enquête sur l’assassinat de Chérubin Okende, particulièrement les conditions de sa disparition du parking de la Cour constitutionnelle, le tout dernier endroit où la victime avait été vue pour la première fois. Le confrère fait, en effet, parler une source qui cite un laveur de voiture qui aurait assisté à l’enlèvement d’Okende à partir du parking de la Cour constitutionnelle.

Ce laveur de voiture, rapporte la source du confrère, aurait déclaré avoir vu Chérubin Okende escorté par des militaires vers l’extérieur du parking jusqu’à un pick-up blanc où Chérubin Okende a été embarqué à l’arrière du véhicule pendant qu’un militaire prenait le volant de sa jeep.

Ce témoignage vient corroborer celui d’un téléspectateur de la chaîne de télévision kinoise, Ma Mission TV, qui a aussi déclaré avoir échangé avec Okende sur le même parking après que celui-ci ait désintéressé quelques laveurs de voitures qui l’entourait. Il déclare aussi avoir suivi la victime, sortie du parking, jusqu’à un pick-up blanc à la hauteur de la maison de France. C’est ici qu’Okende aurait été embarqué à l’arrière pendant qu’un militaire prenait le volant de son véhicule.

Ci-dessous l’intégralité de l’article du Monde.


En RDC, la tension monte après le meurtre de l’ancien ministre Chérubin Okende

Une semaine après la mort du député et ancien ministre Chérubin Okende, il n’y a toujours ni mobile ni coupable ; mais pour les autorités, il y a urgence à faire progresser l’enquête. A cinq mois de l’élection présidentielle en République démocratique du Congo (RDC), le climat se fait étouffant depuis que cette figure de la vie politique locale a été retrouvée, tuée d’une balle dans la tête, dans sa Lexus stationnée sur le boulevard Congo-Japon du quartier de Limete, à Kinshasa, jeudi 13 juillet.
Chérubin Okende, porte-parole du parti de Moïse Katumbi, le principal rival du président Félix Tshisekedi dans la course à la magistrature suprême en décembre, avait disparu la veille à plusieurs kilomètres de là. Il avait été vu pour la dernière fois en plein centre-ville de la capitale, sur le parking de la Cour constitutionnelle, où il attendait son garde du corps, parti déposer pour lui un courrier demandant le report de vingt-quatre heures de son audition par la haute juridiction, qui voulait l’entendre sur sa déclaration de patrimoine.
Crime crapuleux ou un assassinat politique ? Mercredi, Firmin Mvonde, le procureur général près la Cour de cassation, a estimé que le garde du corps de Chérubin Okende était, à ce stade de l’enquête, « le premier suspect ». Ses déclarations ne sont pas « constantes », a précisé le magistrat, ajoutant que la balle qui a « traversé la tête » du député est bien partie de son arme, « trouvée à côté du corps ». Arrêté quelques heures après la découverte de la dépouille, cet homme qui, selon nos informations, est un cousin par alliance de la victime, est interrogé par les policiers, tout comme le chauffeur du député. « D’autres personnes », dont l’identité n’a pas été révélée, sont en train d’être entendues.
Une version qui ne convainc pas la famille de l’ancien ministre des transports, qui voit derrière sa mort un « assassinat politique ». « Aucune expertise balistique n’a encore été faite, l’autopsie n’a pas non plus été pratiquée pour déterminer les causes réelles du décès, mais le procureur général fait des déclarations à l’emporte-pièce. Ce n’est pas professionnel et cela pousse à croire qu’on veut maquiller l’assassinat », se désole un proche sous couvert d’anonymat.

« Traces de boue séchée »
« Un nettoyeur de voiture qui travaille sur le parking de la Cour constitutionnelle nous a affirmé que le 12 juillet, il avait vu des hommes armés habillés en civil entrer sur le parking et demander à Chérubin Okende de les suivre. Puis, à l’extérieur de la concession, il dit avoir vu des hommes en tenue militaire à bord d’un pick-up Toyota de couleur blanche. Selon ce témoin, l’un de ces hommes a pris le volant du véhicule du député tandis que celui-ci a pris place à l’arrière », poursuit ce proche, estimant que l’enquête fait fausse route.
Des reproches formulés également par le parti de Chérubin Okende, Ensemble pour la République, dont le leader, Moïse Katumbi, a précipitamment interrompu son séjour en Côte d’Ivoire, dénonçant une affaire « politique ». « Il y a beaucoup de manipulations, estime Olivier Kamitatu, son porte-parole. Des traces de boue séchée ont été retrouvées sur le pantalon de Chérubin Okende. D’où viennent-elles ? On a retrouvé sa ceinture de sécurité attachée. Comment est-ce possible ? Son épouse affirme qu’il ne l’attachait jamais. La position dans laquelle le corps a été découvert laisse croire qu’il y a eu une mise en scène. »
« Tout cela s’inscrit dans une logique de persécution de Moïse Katumbi et de ses collaborateurs », poursuit Olivier Kamitatu, accusant les autorités congolaises d’être derrière ce meurtre. Ces derniers mois, les difficultés se multiplient pour les proches du candidat à la présidentielle. Fin mai, l’un de ses plus proches conseillers, Salomon Idi Kalonda, a été arrêté, accusé de collusion avec des rebelles. Juste avant, Mike Mukebayi, un élu du parti, avait également été inculpé.
Ces accusations sont « indécentes », selon Patrick Muyaya, le porte-parole du gouvernement : « On nous a tout de suite accusés. Mais à qui profite ce crime ? Nous n’en tirons aucun profit, dans un contexte où nous travaillons à rassurer la population sur la sécurité, notamment à la veille des Jeux de la Francophonie [du 28 juillet au 6 août à Kinshasa] et des élections de décembre. » Alors que Moïse Katumbi a demandé à la mission des Nations unies en RDC de « conduire les investigations », le gouvernement dit accepter que cette enquête soit internationale et promet que la Belgique enverra « au plus tôt » un expert. Mercredi, le procureur Firmin Mvonde a ajouté que des enquêteurs sud-africain et français étaient aussi « attendus ».
Nathalie Sala Gisa

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