Une enquête menée par l’Inspection Générale des Finances à la Direction générale des recettes de la ville-province de Kinshasa (DGRK) vient de mettre à nu le système de prédation financière qui prive la ville des ressources pour son fonctionnement. Dans une lettre datée du 27 février 2023, en effet, Jules Alingete, premier des flics de l’IGF, signifie au Gouverneur Gentiny Ngobila que les ressources de la ville sont rongées à la source et accuse directement le Ministre provincial des finances d’en être la plaque tournante.
La prédation, explique Alingete, s’opère par des protocoles d’accord, des conventions et des lettres de nivellement du Ministre provincial des finances, etc. ; des pratiques qui « paralysent la chaîne de la recette, de la constatation au recouvrement ».
Ces pratiques, poursuit Alingete, « entraînent une ignorance des droits revenant aux services d’assiette, consacrant la consommation des recettes urbaines à la source et prive ainsi la ville des moyens de sa politique ». Et devant ce dispositif diabolique, l’Inspecteur Général de l’IGF ne va pas par quatre chemins pour signifier à Ngobila que « la sauvegarde des intérêts de la ville passe par le changement d’un acteur clé de la chaîne de la recette, à savoir le Ministre provincial des finances ».
En clair, Alingete éclame la tête de Jean Ngoy Mvunzi, « l’homme de tous les coups de Ngobila » comme on l’appelle à l’Hôtel de ville. Il le réclame et insiste encore : « Compte tenu de graves irrégularités mises à charge de ce ministre des finances (…), sans doute que vous ne manquerez pas de tirer les conséquences nécessaires au rétablissement de la rigueur et de la bonne gouvernance dans la gestion financière de la ville ».
Suspecte levée des boucliers de résistance à l’Hôtel de ville
Cette insistance de Jules Alingete dans sa missive qui se veut sans équivoque n’est pas fortuite. Des sources sures dans les couloirs du Gouverneur Ngobila font état d’un branle-bas de combat qui s’y vit depuis que la tête de Jean Ngoy est réclamée par le premier des flics du fisc. La preuve en est que c’est depuis le 14 février 2023 que Gentiny Ngobila avait été informé, dans ses propres bureaux, des conclusions de la mission d’encadrement et des points saillants qui s’en dégagent. C’est également depuis cette date que Ngobila s’était vu vivement recommander de mettre à l’écart son protégé.
Entre le 14 et le 27 février, 13 jours (soit une semaine) se sont écoulés. Et puisque jusqu’à ce 8 mars 2023 le Ministre Ngoy Mvunzi est toujours en fonction, cela fait au total 22 jours que Gentiny Ngobila fait de la résistance. Puisqu’en vérité, Ngoy Mvunzi est cité sur les lèvres à l’Hôtel de ville comme « le maillon puissant de la dilapidation des avoirs de la ville » ; des avoirs qui, ces derniers mois, seraient devenus la première ressource pour l’ACP, le nouveau parti politique de Gentiny Ngobila dont Jules Ngoy est l’un des membres les plus influents.
Poulain de Fortunat Biselele, l’ancien puissant conseiller privé du chef de l’Etat, on se demande d’où le Gouverneur de la ville tirerait autant de « zèle » pour tenir tête à l’IGF qui est directement rattachée à l’institution Président de la République. Alors que, sous Ngobila, Kinshasa bat tous les records de la mauvaisure financière avec des arriérés de salaires de plus de 28 mois et l’inexistence, depuis belle lurette, des frais de fonctionnement ; alors que l’administration de la ville fonctionne désormais dans des bureautiques par manque de papier duplicateur et d’encre dans les imprimantes, nombre de cadres et agents se demandent si ce n’est carrément pas du titulaire de Jules Ngoy que la ville de Kinshasa devrait être exorcisée. Ils se demandent aussi si c’est avec un tel bilan que le chef de l’Etat peut espérer un meilleur concours de Ngobila à Kinshasa pour rempiler…
Il faut rappeler qu’à ce jour, trois Ministres ont déjà quitté le Gouvernement provincial de Kinshasa.
Dossier à suivre
JDW