Pour 100 FC le Kg de bouteilles en plastique ramassé, le projet KinToko, qui aurait réuni 5.000 T en la première année échue en avril 2022 et bientôt 10.000 T, toutes choses restant égales par ailleurs, n’aurait distribué que pas plus de 476 USD aux pauvres kinois écumeurs des décharges publiques pendant que l’investisseur se fait du beurre, des bonzes de l’Hôtel de ville aussi…, au moment où Kinshasa continue de resplendir de sa saleté et de rouler sur des tapis de plastique.
Depuis un peu plus de deux ans, le paysage de la ville de Kinshasa s’est « enrichi » avec l’apparition, dans certains coins, des amoncèlements de bouteilles en plastique. C’est le projet « KinToko » (pour Kinshasa kitoko – Kin la belle), une initiative de Ok Plast Sarl, filiale du groupe Angel, avec le partenariat avec l’Hôtel de ville de Kinshasa dans le cadre de l’opération dite « Kin Bopeto ». Un partenariat rendu possible par la conclusion d’un partenariat entre cette société et le Gouvernement congolais à travers le ministère de l’Environnement.
D’un investissement de Usd 15 millions, selon son promoteur, ce projet poursuit un double objectif : d’abord d’aider à l’assainissement de l’environnement pour le compte de l’Hôtel de ville ; ensuite procurer la matière première à l’usine de OK Plast. Les bouteilles en plastique sont, en effet, retraitées pour souffler d’autres bouteilles en plastique qui sont réinjectés sur le marché. Ces bouteilles peuvent aussi être broyées pour produire de granulés servant à la production d’autres produits manufacturés en plastique.
Installés à Kingabwa, commune de Limete, l’usine de KinToko est alimentée en matière première par toutes ces bouteilles que les Kinois collectent à travers la ville et drainent vers les plus de 33 points de stockage (sur les 100 prévus). En avril 2022 lors d’une visite guidée de cette usine, le service de communication d’Angel avait laissé entendre qu’en une année de fonctionnement, KinToko avait réussi à rassembler 5.000 T de plastique pour faire fonctionner son usine qui a besoin de 50 tonnes par jour pour tourner à régime optimal.
En faisant les calculs, toutes choses restant égales par ailleurs, KinToko devrait avoir amassé aujourd’hui au moins 10.000 T de bouteille plastique.
476 USD en deux années pour des centaines de ramasseurs de bouteilles en plastique, une misère
Mais la question, à ce jour, est de savoir combien gagnent ces Kinois qui se sacrifient à écumer les décharges publiques et les cours d’eau de la ville, au prix de leur santé et avec des risques divers de blessure ou de morsure de serpent pour rapporter ces précieuses bouteilles. Selon le groupe Angel, en effet, 1 Kg de bouteille plastique rapporte 100 Fc à celui qui le rapporte.
Un petit calcul permet de retenir qu’avec 10.000 T recueillis en un peu plus de deux ans, KinToko n’aura déboursé que 1.000.000 de FC, soit USD 476 au taux moyen de 2.100 FC/$. En clair, pour un investissement qui aurait coûté USD 15 millions, la matière première n’aurait coûté que 476 USD que se sont partagés ces milliers de Kinois qui s’échinent à réunir ces bouteilles en plastique.
Les Ong du secteur environnemental et les associations diverses dénoncent ce qu’elles considèrent comme une arnaque dont est victime le petit peuple kinois. « Une seul bouteille en plastique ramassé coûte à son ouvrier plusieurs manœuvres qu’il effectue en une journée, sans compter les distances parcourues à pied », fait remarquer un activiste du domaine avant de dire sa désolation : « Empocher juste 100 FC pour un Kg de bouteille qui représente pas moins de 100 bouteilles trouvées dans des conditions pénibles, sous un soleil de plomb ou la pluie, dénicher tout cela au fond de la boue des décharges publiques où ces gens avalent toutes les odeurs nauséabondes de la ville, c’est tout à fait injuste ».
L’Hôtel de ville, qui est censé protéger les intérêts de ses administrés devrait revoir cette situation avec son partenaire pour équilibrer les choses, estime un autre qui fait également observer : « S’il faut avoir juste 1.000 FC, il faut réunir 10 Kg de bouteilles plastique. Cela n’est pas commode, car ça représente une masse physique importe quand il faut la stocker quelque part ou la déplacer ». Et de poursuivre : « Plus le nombre de chercheurs des bouteilles plastique augmente, plus il devient difficile d’en ramasser suffisamment pour parvenir à remplir une gamelle de nourriture, soit au moins 5.000 FC (à peu près 2,5$ qui sont largement en dessous du SMIG et du seuil de pauvreté ».
Pendant ce temps, sous couvert de la protection de l’environnement, le promoteur se fait du beurre sur le dos des écumeurs de poubelles, des bonzes de l’Hôtel de ville aussi…
JDW