Dépassements budgétaires : L’ODEP dénonce « un fléau qui consacre le triomphe de l’indiscipline budgétaire »

« Le changement de régime n’a pas changé grand-chose à la mauvaise gestion des finances publiques ». « L’indiscipline budgétaire est devenue une culture de gestion de la res publica ». « L’exécution du budget de janvier à septembre 2021 n’a pas été conforme à la loi des finances y afférente. Il y a inadéquation entre la vision et la programmation, la budgétisation et l’exécution, le suivi-évaluation ».

Ou encore, cette exécution du budget « n’a pas permis ni de créer des richesses ni de promouvoir une croissance économique pro-pauvre ni d’améliorer les conditions sociales de la population ». Et encore : « l’exécution de la loi des finances reste marquée par l’affaiblissement des institutions  caractère social », etc.

Ces phrases, et tant d’autres qui claquent comme un fouet, sont contenues dans le dernier communiqué (daté 7 novembre) de l’Observatoire de la Dépense Publique (ODEP). Cette structure indépendante de « contrôle citoyen des finances publiques » de la RDC tire là les conclusions du rapport général de la Cour des comptes sur le contrôle de l’exécution de la loi de finances rectificative n° 21/028 du 31 décembre 2021.

Des pratiques qui ne rapportent rien de bon à la République

De tous ses constats, l’ODEP tire des considérations générales suivantes :

  1. « (…) le gouvernement peine à améliorer la qualité et l’efficacité de la dépense publique. Ce qui passera par la réduction drastique du train de vie des institutions et l’augmentation des investissements publics porteur de croissance, capables d’améliorer le niveau de vie de la population. Pour l’instant, la loi de finances de l’année reste consacrée aux dépenses de rémunération et de fonctionnement des institutions, malgré les efforts consentis de la mobilisation des recettes.
  2. (…) au fur et à mesure que les recettes publiques augmentent, les dépenses de fonctionnement et de rémunération prennent de l’épaisseur ; tandis que les investissements publics sont toujours trop faibles. Conséquences, les priorités budgétaires telles que définie en amont ne sont pas exécutées.
  3. Les recettes additionnelles mobilisées au cours de la période sont reversées dans le fonctionnement et la rémunération, représentant plus de 80% des dépenses de l’Etat. Des inégalités sociales sont également perceptibles dans la répartition des ressources tirées par l’Etat. Le salaire le plus bas s’élève à 90 $ tandis que le plus élevé est à environ 25.000 $.
  4. Les fonctions politiques restent le travail de prestige, dont le salaire le plus faible dans un cabinet politique se situe entre 800 $ et 3000 $ le mois. Le métier le plus marginalisé reste l’enseignement, avec un salaire moyen de 180 dollars $ ».

Sombres inspirations des antivaleurs

Tout en soulignant que les crédits budgétaires sont limitatifs, l’ODEP estime que les dépassements budgétaires inspirent à la fois :

1. La non crédibilité du budget. Quand, comme en 2020, on prévoit un budget de 11 milliards de dollars et qu’on ne mobilise que 3,7 milliards, les plus puissants chercheront à consommer des crédits initiaux mal évalués et les secteurs pro-pauvres vont être sacrifiés.

2. L’indiscipline budgétaire

3. Le non-respect de la procédure de décaissement des fonds selon la chaîne de la dépense

4. Le dépassement des allocations budgétaires des institutions et ministères de souveraineté au détriment des ministères à caractère social et économique

5. Le manque de réalisme du budget oblige le gouvernement à réajuster ses ambitions pour les aligner sur ses capacités réelles de financement afin d’éviter d’affaiblir tout l’ensemble du processus budgétaire

6. Le déficit du suivi et de contrôle par le parlement, l’IGF, et la Cour des Comptes dans l’exécution du budget ;

7. Le manque de poursuites pour sanctionner des personnes impliquées dans le non-respect des procédures ;

8. Plus des moyens pour les institutions et très peu pour les secteurs pro-pauvres ;

9. La non prise en compte du principe sacré de la justice distributive ;

10. L’impossibilité de mettre en œuvre les belles orientations du plan national stratégique de développement ;

11. La non prise en compte des recommandations de la Société civile pour améliorer la gouvernance budgétaire ;

12. Le dépassement budgétaire est un indice de probable vol de Fonds Publics et de corruption ».

Le peuple invité à sanctionner

Après cette analyse implacable, l’ODEP formule une série de recommandations adressées aussi bien au chef de l’Etat qu’au Gouvernement, au Parlement, à la société civile et à tant d’autres institutions. Mais au peuple congolais particulièrement, l’ODEP recommande de « tirer les conséquences de la non prise en compte de manière effective des besoins sociaux dans l’exécution des budgets de l’Etat 2017-2019 et d’exiger des comptes aux dirigeants actuels avant tout renouvèlement des mandats ». Au peuple également de « poser, lors des élections à venir, un vote capable d’amener le pays vers un changement vivement souhaité par tout le monde ».

JEK

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