Processus de paix en RDC : à Doha, bataille des préalables entre Kinshasa et le M23/AFC

À Doha, où se tient le Deuxième Sommet mondial pour le développement social du 4 au 6 novembre, les médiateurs qataris s’efforcent d’arracher un accord entre le gouvernement congolais et la rébellion de l’AFC/M23. Mais les divergences restent profondes sur deux points majeurs : le retrait du M23 et la restauration de l’autorité de l’État considéré comme préalable à l’accord pour Kinshasa et conséquence de l’accord pour la rébellion. Un texte final est toutefois négocié pour être signé avant la clôture du sommet, ce 6 novembre.

Alors que s’ouvre ce mardi dans la capitale qatarie le Deuxième Sommet mondial pour le développement social (WSSD2), un autre front diplomatique, plus discret mais décisif pour la paix en Afrique centrale, se joue dans les coulisses : la médiation du Qatar entre le gouvernement congolais et la rébellion de l’AFC/M23, sous le regard attentif des présidents Félix Tshisekedi et Paul Kagame, tous deux déjà présents à Doha.

Les autorités qatariennes, engagées depuis plusieurs mois dans une diplomatie de facilitation entre Kinshasa, Kigali et les groupes armés de l’Est de la RDC, espèrent faire de cette semaine un moment charnière. Selon plusieurs sources proches du dossier, un projet d’accord est déjà à sa treizième version.

Les médiateurs, qui multiplient les consultations bilatérales, tentent de dégager un texte de compromis avant la fin du sommet, prévue pour le 6 novembre.

Les lignes de fracture : retrait du M23 et restauration de l’État

La semaine dernière, les deux délégations — celle du gouvernement congolais et celle du M23/AFC — se sont retrouvées à Doha sous la supervision du Qatar. L’objectif initial était de parvenir à la signature d’un “framework”, un protocole fixant les bases de l’accord de paix définitif.

Mais les discussions se sont heurtées à deux divergences majeures. Pour Kinshasa, la restauration de l’autorité de l’État est une priorité absolue, qui suppose le retrait immédiat du M23 des zones occupées. Ce retrait ouvrirait ensuite la voie à une intégration politique encadrée et à des garanties institutionnelles.

Pour le M23/AFC, en revanche, la restauration de l’État ne peut être qu’une conséquence du dialogue, et non son préalable. Le mouvement rebelle défend la création d’un gouvernement d’union nationale ou d’une transition inclusive, chargée de ramener l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire.

Face à cette impasse, certains médiateurs ont évoqué l’idée d’un accord partiel, limité aux points de convergence, en attendant une phase politique ultérieure pour trancher les désaccords.

Doha, carrefour de la paix et du social

Le choix de Doha pour accueillir à la fois le Sommet mondial sur le social et ces discussions de paix n’est pas anodin. Trente ans après Copenhague, la communauté internationale se retrouve pour réfléchir à un modèle plus équitable de développement humain, mais le dossier congolais rappelle crûment que la paix reste la première condition du progrès social.

Les diplomates qataris, réputés pour leur neutralité pragmatique, comptent sur la présence simultanée des deux chefs d’État et de plusieurs partenaires internationaux pour briser la méfiance mutuelle qui paralyse le processus.

Selon des sources proches du dossier, l’accord final entre le gouvernement congolais et le M23/AFC est désormais en négociation accélérée et pourrait être paraphé avant la clôture du sommet, le 6 novembre, puis entériné ultérieurement aux États-Unis, lors d’une réunion que Donald Trump aurait promis de convoquer pour sceller les engagements obtenus.

Un climat de tension extrême

Ce regain diplomatique se déroule sur fond de tensions exacerbées entre Kinshasa et Kigali. Il y a à peine deux jours, le président Félix Tshisekedi a accusé son homologue rwandais Paul Kagame de vouloir occuper, voire annexer, l’Est de la RDC, une déclaration qui a immédiatement ravivé la crispation entre les deux pays.

« Pour défendre mon peuple, je suis prêt à tout, même à redevenir militaire », a martelé le président congolais, dans une formule qui a fait le tour des chancelleries.

Malgré ce climat tendu, le Qatar tente de maintenir le dialogue ouvert, convaincu que le moment de Doha peut encore inverser le cours de la crise.

Selon certaines sources diplomatiques, les médiateurs auraient obtenu de premiers accords de principe sur la démilitarisation progressive de certaines zones, un geste de confiance censé favoriser la conclusion du texte principal.

Entre les principes irréconciliables et les impératifs de paix, la diplomatie qatarienne joue ici une partie serrée — celle où le social et le politique se rejoignent dans un même espoir : voir renaître la paix dans les Grands Lacs avant la fin du sommet. Y parviendra-t-elle ?

JEK

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