Alors que la ville de Kinshasa croit avoir tenu le bon bout pour lutter contre les embouteillages avec la stratégie de la circulation alternée par immatriculation (paire et impaire) combinée avec la circulation nocturne des gros engins, la fédération des entreprises du Cogo (FEC) sort la grosses artillerie pour descendre en flamme cette trouvaille du tandem Daniel Bumba, Gouverneur de la ville, et Bob Amiso, Ministre provincial des transports. Pour de l’artillerie lourde, les entrepreneurs n’ont pas fait dans la dentelle ce mardi 20 mai 2025 au cours d’une réunion qui avait tout l’air d’une veillée d’armes dans les tranchées.
Sous la présidence du Vice-Premier Ministre, Ministre des Transports, Voies de Communication et Désenclavement, et en présence du Gouverneur de la ville, des députés nationaux, des représentants du patronat, du syndicat des travailleurs et des opérateurs économiques concernés par la future mesure de régulation de la circulation des camions, la réunion de restitution et d’harmonisation des vues a tourné en une véritable mise à mort pour ce qui pourrait se terminer par un mort-né avec la mesure à polémique des autorités de la ville. De 11h00 à 15h00 au siège de la Fédération, soit pendant 4 heures, les protagonistes ont fait le point sur les contours de la mesure annoncée par le Gouverneur de la Ville, soulevant aussi bien l’ire que l’hilarité des Kinois.
Alors que, pour l’Autorité urbaine, cette mesure vise à fluidifier le trafic, les opérateurs économiques ont déployé un argumentaire en béton pour démontrer combien cette stratégie « implique une reconfiguration profonde de l’activité économique, avec un basculement structurel vers un fonctionnement logistique nocturne ».
Dans un communiqué ce mardi soir, la FEC note que tous les participant à cette réunion « ont souligné qu’un tel changement ne saurait produire les effets escomptés sans la mise en œuvre préalable d’un ensemble de conditions indispensables, tant sur le plan réglementaire, que logistique, organisationnel et sécuritaire ». cette double mesure, ont-ils insisté, consiste carrément en un « changement de paradigme, qui ne concerne pas uniquement les transporteurs, mais un pan entier de l’économie nationale et urbaine : tissu industriel, tissu commercial, entrepôts, services de l’État, stations-service, banques et assurances, services financiers, ports, personnel de manutention, prestataires auxiliaires, consommateurs, etc. »
Et cette autre démonstration : « La généralisation du travail de nuit pour certains secteurs représente un basculement complet de leur mode de fonctionnement habituel, ce qui suppose :
- L’adaptation de certains cadres juridiques (travail de nuit, travail des femmes, sécurité du déchargement, etc.) ;
- La redéfinition des horaires et obligations des services publics impliqués ;
- L’organisation sécuritaire des points de passage et de déchargement ;
- La mobilisation de services annexes et connexes nécessaires au bon déroulement des opérations nocturnes (carburant, paiements, maintenance, etc.) ».
La réunion a également noyé que « le passage à une économie nocturne dans des secteurs aussi sensibles que le transport, la distribution et les services de soutien ne peut s’improviser. Sans une structuration préalable, claire et cohérente du cadre juridique, logistique et opérationnel, cette mesure ne saurait atteindre les objectifs affichés. Il ne s’agit pas d’exprimer une opposition de principe, mais de souligner avec fermeté que la réussite de cette réforme dépend exclusivement de la mise en place effective de ces préalables. Faute de quoi, les risques de perturbation, de rupture de chaîne logistique, voire de paralysie de certaines activités, ne peuvent être écartés ».
Au bout du compte, malgré les propositions déjà formulées par certaines parties prenantes et « au regard de l’ampleur sectorielle des impacts », une nouvelle réunion a été fixée pour le 25 mai pendant que les uns et les autres vont poursuivre les consultations internes.
Malgré cela, le Ministère provincial de l’Intérieur a publié, le même 20 mai, un communiqué annonçant les restrictions à la circulation des gros engins pourtant décriées, menaçant même que tout contrevenant s’exposera à des sanctions.
Jusqu’où donc Bob Amiso ira ou n’ira pas, rendez-vous ce 25 mai 2025.
Albert Osako