Le Conseil de sécurité de l’ONU a dénoncé dimanche le «mépris éhonté» de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo (RDC). Il a réclamé le retrait «des forces extérieures», sans les nommer explicitement.
Cette déclaration publiée dimanche soir fait référence à un rapport d’experts de l’ONU ayant dénoncé la présence de forces rwandaises en RDC et leur soutien au groupe armé M23 qui combat l’armée congolaise. Elle est publiée aussi après la réunion spéciale tenue à la demande de la RDC suite notamment aux pressions sur la ville de Goma.
Le groupe armé antigouvernemental du M23 (« mouvement du 23 mars ») et 3.000 à 4.000 soldats rwandais, selon l’ONU, combattent l’armée congolaise dans la région depuis plus de trois ans. Les combats dimanche se sont tenus aux portes de Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu de plus d’un million d’habitants et presque autant de déplacés.
Ce matin, la situation est confuse à Goma où l’on signale la présence des forces rwandaises et du M23 dans certains quartiers alors que d’autres sont encore tenus par les FARDC et les Wazalendo.
La mission de l’ONU en République démocratique du Congo (MONUSCO) et les forces de la SAMIRDC s’étaient engagées dans les combats contre le M23 en soutien de l’armée congolaise. Des soldats rwandais et des combattants du M23 ont pénétré la ville dimanche, selon plusieurs sources onusiennes et sécuritaires.
Sommet avec Tshisekedi et Kagame
Le président kényan William Ruto a annoncé dans un communiqué réunir «dans les prochaines 48 heures» un sommet extraordinaire de la communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) en présence des présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame. Une médiation entre la RDC et le Rwanda sous l’égide de l’Angola a échoué suite à l’absence du Président Paul Kagame alors que son homologue Félix Tshisekedi était présent dans la capitale angolaise.
Kinshasa a accusé dimanche le Rwanda de lui avoir «déclaré la guerre» en envoyant de nouvelles troupes alors que l’ONU a appelé Kigali à retirer ses forces de la région. Kigali a répliqué dans la soirée conserver une «posture défensive durable» au vu des combats représentant «une menace sérieuse à la sécurité du Rwanda», selon son ministère des affaires étrangères.
«Sanctions ciblées»
Si plusieurs membres du Conseil de sécurité de l’ONU ont clairement pointé du doigt Kigali, la déclaration commune réclame le retrait des «forces extérieures» sans les nommer explicitement. La ministre congolaise des affaires étrangères Thérèse Kayikwamba Wagner a, pendant le conseil, réclamé «des sanctions ciblées» contre les dirigeants militaires et politiques rwandais ainsi qu’un «embargo total sur les exportations de tous les minerais étiquetés comme rwandais».
Le secrétaire général de l’ONU António Guterres a également clairement mis en cause Kigali en appelant «les forces rwandaises de défense à cesser de soutenir le M23 et à se retirer du territoire de la RDC». Les Etats-Unis se sont déclarés prêts à employer «tous les outils» disponibles contre ceux qui alimentent le conflit.
L’Union européenne a appelé le M23 à «arrêter son avancée» et le Rwanda à «se retirer immédiatement». L’Union africaine (UA) a réclamé «la stricte observation du cessez-le-feu convenu entre les parties» à la fin juillet.
Dimanche, un drone rwandais a ouvert le feu sur des positions congolaises à environ 6 kilomètres de Goma, faisant au moins deux blessés parmi les paramilitaires.
Guerre récurrente sur Goma
Des bombardements ont touché le camp de déplacés de Rusayo, dans la périphérie de Goma, selon plusieurs sources humanitaires qui n’ont pas donné de bilan. Treize soldats sud-africains, malawites et uruguayen, déployés au sein de la force régionale d’Afrique australe (SAMIRDC) et la MONUSCO ont été tués dans des combats contre le M23 ces derniers jours, selon les autorités des trois pays.
Le Rwanda a indiqué avoir «évacué» vendredi son dernier diplomate à Kinshasa. La RDC avait de son côté annoncé samedi rappeler ses diplomates à Kigali «avec effet immédiat».
La ville de Goma avait été brièvement occupée à la fin 2012 par le M23 (« mouvement du 23 mars »), né cette année-là et vaincu militairement l’année suivante.
Dans l’est de la RDC riche en ressources naturelles, les conflits s’enchaînent depuis plus de 30 ans.
Les dernières violences ont encore aggravé une crise humanitaire chronique dans la région. Selon l’ONU, 400.000 personnes ont été déplacées par les combats depuis le début janvier.