Sécurité à l’Est de la RDC/Lusaka : 23 mars 2024 à cause du 23 mars 2009 !

Hasard du calendrier ou non, les faits sont indéniables. C’est, en effet, à cette double date précisément qu’avec 15 ans d’écart, Goma 2009 a conduit à Lusaka 2024. Rappel : le 23 mars 2009, le Gouvernement de la République Démocratique du Congo signe avec l’organisation insurrectionnelle Cndp le document intitulé « ACCORD DE PAIX ENTRE LE GOUVERNEMENT ET LE CONGRES NATIONAL POUR LA DEFENSE DU PEUPLE ». Le 23 mars 2024 : la Troïka de la Sadc se réunit à Lusaka pour convenir des dispositions à prendre pour ramener la paix à l’Est de la RDC, paix perturbée notamment par le M23 servant de supplétif à l’armée gouvernementale rwandaise présente sur le sol congolais.

«COMPRENDRE LES DYNAMIQUES AUTOUR DES MOUVEMENTS ARMÉS DANS L’EST »

C’est la non-application de l’Accord du 23 mars 2009 par la partie Gouvernement qui va susciter une dissidence au sein du Cndp et justifier la création du M23, dissidence ayant fait sa sortie officielle le 4 avril 2012, près de 4 mois après l’investiture de Joseph Kabila pour un second mandat. Du moins, selon la position des dissidents.
Pour cette date anniversaire, le journaliste historien Benjamin Babunga Watuna note à l’attention du lectorat : «…ceux qui s’intéressent à la communauté Tutsi du Nord-Kivu savent pertiennement qu’il existe une sorte de rivalité entre les Tutsis de Masisi (Abagogwe) et les Tutsis de Rutshuru (Abanyejomba). Ce sont ces frustrations qui mèneront à cette guerre interne (très intense d’ailleurs) au sein du M23 en 2012». Et d’ajouter : «Je pense sincèrement, à mon humble avis, qu’il est important pour les Congolais de bien comprendre les dynamiques autour des mouvements armés dans l’est du pays, les communautés de l’est du pays, les dynamiques politiques au Nord Kivu, la nature de la relation des Congolais rwandophones avec le Rwanda (beaucoup d’entre nous qualifient tout Congolais rwandophone de ‘rwandais’), les dynamiques internes au sein de la communauté Tutsi du Nord-Kivu, etc. Très peu d’entre nous s’intéressent à ces aspects ; d’où nos errements lorsqu’il s’agit de penser froidement sur les conflits dans l’est de la RD Congo».

ÇA SORT ALORS D’OÙ, CE PLAN DE SESSION DES TERRITOIRES

La prudence à laquelle BBW convie ses compatriotes incite à poser la question de savoir pourquoi les Congolais s’acharnent-ils à faire dire à l’Accord de Goma entre le Gouvernement et le Cndp ce qu’il n’a jamais dit !
Signé pour le Gouvernement par Raymond Tshibanda en sa qualité de ministre de la Coopération Internationale et Régionale et Désiré Kamanzi en sa qualité de président du Cndp, l’Accord a deux grands témoins africains crédibles sur la scène internationale, tous les deux Chefs d’Etat honoraires et encore en vie : le nigérian Olusegun Obasanjo (Envoyé spécial du Secrétaire Général des Natiobs Unies pour la Région des Grands Lacs) et le tanzanien Benjamin William Mkapa (co-facilitateur pour l’Union Africaine et la Conférence internationale sur la Région des Grands Lacs).
Etalé sur 11 pages PDF, cet accord comprend 16 articles portant successivement sur :

  • la Transformation du Cndp en parti politique (article 1) ;
  • les Prisonniers politiques (article 2) ;
  • l’Amnistie (article 3) ;
  • le Mécanisme national de réconciliation (article 4) ;
  • la Résolution des conflits locaux (article 5) ;
  • le Retour des réfugiés et des déplacés internes (article 6)
  • les Zones sinistrées (article 7) ;
  • l’Administration du Territoire (article 8) ;
  • l’Administration Publique (article 9) ;
  • la Réforme de l’Armée et des Services de Sécurité (article 10) ;
  • le mode de scrutin (article 11) ;
  • les Questions spécifiques (article 12) ;
  • les Réformes économiques (article 13) ;
  • le Comité national de suivi (article 14) ;
  • le Comité international de suivi (article 15) et
  • la date d’entrée en vigueur de l’Accord (article 16).
    Il a une annexe dénommée « PLAN DE MISE EN ŒUVRE » étalé sur 9 pages PDF.
    Quand on termine de lire les 20 pages, on en vient à se demander ça sort alors d’où, ce plan de cession des territoires à placer sous administration du Cndp auquel le M23 veut se substituer, plan que des « éminentes personnalités » congolaises, dont des professeurs d’université, des acteurs politiques et des chroniqueurs politiques décortiquent le contenu dans les tribunes à leur portée en étant conscients de mentir de façon aussi éhontée !

DES CONTRIBUTIONS À DÉBATTRE…

Prenons l’Administration du Territoire (article 8), l’Administration Publique (article 9) et la Réforme de l’Armée et des Services de Sécurité (article 10).
Voici ce qui en découle :

Article 8. De l’Administration du Territoire
« *8.1. Les parties conviennent que le rapprochement de l’administration des administrés est une exigence de bonne gouvernance (…). *8.2. Se fondant sur la nécessité d’une meilleure prise en compte possible des réalités sociologiques du pays, le CNDP a proposé un modèle de découpage du territoire national (…) *8.3. Il a été convenu d’enregistrer la contribution du CNDP sur ce sujet comme un élément de réflexion pour l’amélioration constante de l’efficacité de l’Administration du Territoire».

Article 9. De l’Administration Publique
«9.1. Les parties s’accordent sur le fait que l’administration devrait répondre aux besoins de proximité que ressentent les populations locales (…) «9.2. Dans ce cadre, le CNDP a proposé que l’Administration publique soit prise en charge par des Agences Nationales techniquement et financièrement autonomes, quoique sous tutelle des Ministres (…)*9.3. Il a été convenu de verser cette contribution du CNDP à la partie gouvernementale pour enrichir les réflexions liées à la réforme de l’Administration publique en République Démocratique du Congo».

Article 10. De la réforme de l’Armée et des Services de Sécurité.
«10.1. Les deux parties ont convenu qu’une réforme de l’Armée et des Servixes de Sécurité de la RDC constitue une priorité (…) «10.2. Le CNDP a proposé des orientations stratégiques pour une telle réforme. (…) *10.3. Le Gouvernement, qui est conscient de cette nécessité et y travaille déjà, s’engage à inscrire la réforme de l’Armée et des Services de Sécurité en première ligne des activités à réaliser dans les meilleurs délais».
En retenant le 3ème article de chacun de ces sujets, on se retrouve avec une constante dans le chef du Gouvernement : *oui, mais à verser dans une réflexion approfondie*.


Au fait, le Gouvernement n’a rien cédé au CNDP.
Même pour les autres sujets (mode de scrutin, réinsertion des cadres administratifs et des députés provinciaux du Cndp, chefs coutumiers, autorité de l’Etat, bien spoliés etc., la constante est de mise), il se dégage que ni dans l’Accord de Goma avec le Cndp de 2009, ni d’ailleurs dans les Déclarations de Nairobi de 2014, le Gouvernement n’a cédé quoi que ce soit qui tienne de la *souveraineté nationale*.
Dès lors que tout ce qui se dit de l’Accord de Goma est faux et, en plus, il s’avère que l’Accord Gouvernement/M23 n’existe pas, la déduction à tirer est que la propagande n’aura servi en réalité qu’à fournir à l’opinion non avertie des *informations erronées*.


Pour quelle raison alors ?
La vérité est que s’il avait accédé à la bonne information au nom du principe de continuité de l’Etat, le régime Félix Tshisekedi (se) serait fait l’économie de se retrouver le 23 mars 2024 avec un M23, né des frustrations internes, rappelle Benjamin Babunga Watuna.

Omer Nsongo die Lema
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