Encore une affaire de coupures de presse. De vieilles coupures de presse, et, une fois de plus, sur une question de nationalité. Et une fois encore, sur Moïse Katumbi.
Hier déjà, c’est la justice congolaise, à son plus haut sommet, qui a eu à délibérer entre une vulgaire coupure de presse et un document authentique émis par sa propre administration. Dans sa requête en illégalité de la candidature de Moïse Katumbi pour cause de nationalité italienne qu’il alléguait, en effet, Noël Tshiani avait saisi la Cour constitutionnelle au moyen d’un vieil article de jeune Afrique qui, du reste, avait été démenti par le même magazine dans un article subséquent riche en détails et preuves tangibles.
Aujourd’hui, c’est au souverain primaire que le même Katumbi est livré par les partisans du Chef de l’Etat sortant, cette fois encore, au moyen d’une information de presse au sujet, une fois de plus, de sa nationalité, cette fois-ci zambienne.
Le coup est du camp de campagne de Félix Tshisekedi dont la manipulation est cousue de fil blanc. Une manipulation basée sur un vieil article d’un média en ligne zambien daté d’août 2018, mais dont le contenu est à la fois sorti de son contexte et complètement dénaturé pour se faire dire autre chose.
Les observateurs ne s’en étonnent guère et considèrent ce « pétard mouillé » comme un ultime acte de désespoir du « team Fatshi ». Non contente d’avoir manipulé quelques médias de la place, ces communicateurs désespérés sont allés jusqu’à manipuler la RTNC, média d’Etat, qui s’est fendue d’une revue de presse dite « à thème » basée sur un fake news.
L’article de la presse zambienne dans sa version originale et originaire
La vieille coupure de presse c’est, en fait, cet article du journal zambien en ligne Diggers (diggers.news) intitulé « NDC asks gvt to explain Katumbi’s zambian passport ». Le journal en ligne reprend la déclaration du Secrétaire général du parti zambien d’opposition (à l’époque) NDC qui demande au Gouvernement zambien de s’expliquer sur le passeport zambien que détient (en son temps) Moïse Katumbi.
Selon ce chef de parti, dont les propos sont repris dans cet article, il s’agit d’un « passeport diplomatique » que détiendrait (remarquez le conditionnel) le « sujet congolais » Katumbi.
Mwenya Musenge, Secrétaire général du NDC, souligne, dans la même déclaration, qu’il n’a rien contre le congolais Katumbi, mais qu’il s’agit d’une question interne (à la Zambie) qui « pourrait potentiellement compromettre la paix et la sécurité nationales ». Même si, plus loin, il affirme que « la Zambie ne devrait pas et ne sera jamais utilisée comme un refuge pour les étrangers ».
Et en fait de questions de paix et de sécurité, la position du parti zambien d’opposition se justifie, à cette époque, par une entrée massive d’étrangers, particulièrement des chinois, à qui le passeport zambien est remis à tour de bras.
Le contexte et le sens
Pour bien comprendre le sens de l’article, c’est-à-dire de la déclaration du parti zambien NDC, il faut se replonger dans le double contexte de l’époque. D’abord celui de la RDC où le Gouvernement est en croisade contre un de ses citoyens, Moïse Katumbi, pour rabattre ses ambitions présidentielles. La bataille est tellement rude que le Gouvernement congolais ne trouve pas d’autre formule, pour être en paix, que de laisser le farouche opposant s’en aller en exil.
Ensuite, par rapport à la Zambie, cette situation préoccupe certains milieux qui craignent que le séjour assez régulier de Moïse Katumbi, l’exilé, ne suscite des frictions diplomatiques avec la RDC voisine, son pays d’origine. Mais aussi, la question spécifique de passeport n’occulte pas une situation plus large ou ce sauf conduit zambien est distribué à tout venant, surtout à des chinois qui entrent massivement, ce qui fait craindre le parti NDC pour la paix et la sécurité intérieure.
Désinformation délibérée : Rien à voir avec une nationalité zambienne de Katumbi
Il faut souligner que cette « information » sur la déclaration du parti zambien a été également traité par d’autres médias de la Zambie, dont la Lusakatimes, mais dans exactement les mêmes termes des propos du Secrétaire général de la NDC dont ils ont tous (les médias) eu l’honnêteté professionnelle de garder l’authenticité.
De ce qui précède, il est clair que l’opposition zambienne, dont les propos sont repris par le média zambien sous examen, ne traite nullement d’une nationalité zambienne qu’aurait alors détenue Moïse Katumbi. D’ailleurs, l’article le désigne, dès sa première phrase, comme un « citoyen congolais ». Et plus loin, le Secrétaire général du NDC parle, faisant clairement allusion à Katumbi, des « étrangers » dont la Zambie ne doit et ne sera jamais une terre d’asile.
On est donc loin, bien loin, de cette désinformation délibérée dont se sont rendus coupables l’armée numérique et les histrions communicateurs de Félix Tshisekedi jusqu’à entraîner la chaîne publique, la RTNC, dans ce sordide exercice de fakenews.
Des confrères embarqués dans une sordide entreprise de désinformation
Bref, tout ce que les désinformateurs du pré-carré de Tshisekedi ont eu l’honnêteté de préserver de l’article zambien déformé, c’est l’illustration qui a été largement et maladroitement partagée par les médias congolais qui se sont laissé manipuler ainsi que la rédaction de la RTNC qui en a fait l’une des illustrations de sa revue de presse de lundi dernier lors du journal télé présenté par la pourtant excellente Françoise Bwela.
En temps normal, la participation à une telle entreprise de désinformation devrait intéresser les organes compétents de l’UNPC pour des sanctions correspondantes.
On est, en effet, dans un cas d’infraction flagrante au code d’éthique et de déontologie dans ce sujet dont le document de départ circulait déjà dans les réseaux sociaux avant que les confrères n’en fassent les choix gras dans leurs titres respectifs. La première version de cet article déformé (voir extrait ci-contre) du journal zambien « Diggers » a, en effet, circulé à travers des groupes Whatsapp sous la signature d’un certain « Marc Matunga » affublé des titres » Le défenseur du parti présidentiel, Le black Kaiser, Le guerrier de l’Apocalypse ».
La période de campagne est, certes, un grand moment de la démesure, mais il revient à chaque professionnel de savoir mesure garder, car le code d’éthique et de déontologie du journaliste n’est pas un grimoire à géométrie variable. Le journalisme demeure le même avant, pendant et après les élections.
Jonas Eugène Kota