RDC/Dialogue national : Tshisekedi tend la main pour imploser l’opposition, Kabila parle mais garde toutes ses cartes en main

Coïncidence fortuite ou stratégies antagonistes à distance ? Au cours du même week-end dernier, Joseph Kabila et Félix Tshisekedi se sont exprimés principalement sur les questions de politique intérieure liée à la crise en RDC.

Si Joseph Kabila a rompu plus de six années de silence en se soumettant à la tempête des critiques tout en maintenant tout le mystère sur ses vraies stratégies et sa pensée profonde, Félix Tshisekedi, lui, semble avoir levé un coin de voile sur ses moyens politiques.

Face à sa propre famille politique, en effet, le chef de l’État a fait une sorte de bilan à mi-parcours de la bataille pour le recouvrement de l’intégrité territoriale de la RDC avant de bifurquer sur les enjeux politiques de la question, notamment autour du dialogue proposé par les chefs religieux.

Félix Tshisekedi dans les escarpements du débauchage politique

Dans l’ensemble, même s’il rejette vigoureusement la paternité de la démarche des chefs religieux, le Chef de l’État y est clairement disposé. Cela d’autant plus que, tout en posant son préalable de refus de tout dialogue avec les « pantins », il organise son avancée vers ce moment en engageant un élargissement de sa nasse dans le pure style de la politique à la congolaise.

En effet, lorsqu’il dit tendre sa main aux forces disposées à la saisir et qu’il met à contribution son Conseiller spécial pour ce faire, Félix Tshisekedi avance l’appât du gouvernement d’union nationale. Une stratégie qui, par le passé, consistait en une pêche à la ligne dans le camp des forces d’opposition réelle pour les désagréger, cela généralement pour gagner du temps ou repousser les vraies échéances des vrais ajustements.

Comme, par exemple, ce que fit Joseph Kabila avec Samy Badibanga après le dialogue de la cité de l’UA, puis après le Centre interdiocésain avec Bruno Tshibala, tous les deux du tout dernier pré-carré, non pas de l’Udps, mais tshisekediste pure jus du père.

Mobutu l’avait fait plusieurs fois en sept années de transition avant et après la CNS, notamment au sein de l’Udps. Jusqu’à piéger le Sphynx Tshisekedi en personne à Kibomango dans le but de le discréditer auprès de ses pairs de l’Udps et de l’Union sacrée de l’opposition radicale (USOR) en le faisant accuser de négocier avec le pouvoir dans leur dos.

On sait comment tout cela s’est terminé… et peut encore se terminer.

Joseph Kabila, silence rompu mais mystère entier

Joseph Kabila Kabange est, depuis le week-end, le focus de l’actualité politique en RDC. Sa tribune publiée ce dimanche sur la crise en RDC domine aussi bien dans les analyses de presse que dans les échanges des salons capitonnés à Kinshasa comme à travers le monde.

Le taiseux ancien Président aura au mis mis d’accord sur la mesure de sa stature qui, qu’on l’aime ou pas, fait de lui incontournablement un acteur plus que majeur sur la scène politique congolaise malgré les années d’hibernation. Pour preuve, sa tribune a littéralement éclipsé de l’actualité la causerie politique de Félix Tshisekedi avec son Union Sacrée de ce samedi.

En effet, ce sont surtout les inconditionnels de la tshisekedie qui s’activent à bras raccourcis sur l’ancien chef de l’État qui est couvert de tous les noms d’oiseaux – le contraire aurait surpris ici – sans, cependant, le rencontrer dans l’approche dialectique que suggère sa démarche.

Joseph Kabila a, à tout prendre, posé le problème en en faisant son diagnostic sans pour autant proposer des solutions ni prendre formellement une position claire. Dans le fonds, sa sortie de plus de six années d’hibernation ne permet pas encore de connaître sa pensée précise.

À ce stade, en effet, le Sénateur à vie entretient le mystère en se limitant à décliner son approche à lui de ce que devrait être la marche vers la solution à la crise et non la solution proprement dite. Pour lui, il devrait s’agir d’une approche holistique intégrant les ajustements politiques, démocratiques et de gouvernance.

Sans oublier le volet militaire, l’ancien chef de l’État est d’avis que le premier volet devrait pouvoir faire l’économie des finances sur le second. Autrement, estime-t-il encore, l’on risque d’assister à l’aggravation de la situation.

Il va alors rester que Kabila décline le déroulé d’une telle approche holistique pour savoir, par exemple, avec qui l’aborder et avec qui ne pas l’aborder ; quel format donner à cet abord et pour quel débouché, c’est-à-dire :

-transition vers des élections avec les ajustements dans l’actuel ordre institutionnel dans le style post Sun city ?

-Ouverture sur un gouvernement de réelle union nationale et non de débauchage comme il le fit lui-même plusieurs fois ou comme tend à le laisser entendre les choix de Tshisekedi ?

-Ou carrément tabula rasa en faisant partir le régime en place comme l’exigent certains radicaux de l’opposition ainsi que les rebelles ?

En attendant de trouver des réponses à ces questions, on notera que Kabila, quoique toujours mystérieux, est déjà paré pour dialoguer depuis qu’il a restructuré son parti en remettant en piste son négociateur Aubin Minaku, celui-là même qui était au « front » du centre interdiocésain en 2016.

Jonas Eugène Kota

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