Crise du maïs au Katanga : 10 ministres à la recherche du maïs en Afrique australe en plein désertification !

Laissant, dans leur propre pays, des millions d’hectares de terres arables inexploitées malgré la vision de la revanche du sol sur le sous-sol, un bataillon de membres du Gouvernement écume la Zambie et l’Afrique du Sud dont les productions agricoles sont en chute libre suite à la désertification, alors que l’Afrique du Sud, particulièrement, développe, dans son agriculture, les OGM prohibés en RDC. Impensable…

Dix ministres (vous avez bien lu) sillonnent l’Afrique australe à la quête des solutions à la crise du maïs qui sévit dans la grand Katanga et l’espace Kasaï où cette denrée est un aliment de base. Dix ministres et non des moindres, en effet : Vital Kamerhe, Vice-Premier ministre et ministre de l’Economie nationale, chef de la mission. L’homme se retrouve ici, en Afrique australe où l’un de ses prédécesseurs avait engloutis 6 millions de dollars dans les eaux maritimes namibiennes pour pêcher 27.300 tonnes de poisson que les assiettes des congolais démunis n’ont jamais vu.

Kamerhe coach donc un team de choc où l’on compte Jean Lucien Bussa Tongba du Commerce extérieur. Egalement de la partie, Nicolas Kazadi, l’argentier national, marque sa disponibilité à expatrier nos réserves financières au lieu de financer l’agriculture dans les terres plus qu’arables de son pays. Et José Mpanda, le chef de ces terres agricoles fait aussi partie de la délégation.

Mais, surprise, l’on retrouve aussi Didier Budimbu, Ministre des hydrocarbures dont la présence dans cette composition suscite de grosses interrogations. Un peu comme un basketeurs qui se retrouve dans une arène de football. L’on peut aussi s’interroger, dans une certaine mesure, sur la présence aussi du Ministre de l’Industrie, Julien Paluku, tandis que Désiré Mzinga Birihanze de l’Entrepreneuriat a bien à réfléchir pour booster l’entrepreneuriat du secteur de l’agriculture.

D’autres têtes sont également de la partie, comme la ministre près le Président de la République Nana Manwanina, le vice-ministre du Plan Pascal Omana Bitika, et le secrétaire général adjoint du gouvernement, Alphonse Padjabale Kabuasa.

Offensive en pleine désertification

Mais que vont-ils tous faire en Afrique australe, s’interrogent bon nombre d’observateurs médusés par une telle mission. Surtout lorsqu’ils découvrent l’objet sur l’ordre de mission : s’imprégner de la situation de la hausse des prix de la farine de maïs dans l’espace Grand Katanga et Grand Kasaï.

De prime abord, on comprend que le Gouvernement a choisi la facilité d’externaliser la cause de la crise alimentaire en RDC, 63 ans après son accession à l’indépendance. Et en un mot, dix ministres se sont constitués en union sacrée pour enrayer, le plus officiellement du monde, la vision de la « revanche du sol sur le sous-sol » prônée par le chef de l’Etat.

Pourtant, le vendredi 14 avril 2023 au conseil des ministres, Félix Tshisekedi a annoncé la création d’un Conseil consultatif présidentiel pour le pacte national de l’agriculture et de l’alimentation (CCP-PNAA). Une structure qui, selon la logique de l’équipée en Afrique australe, risque de se réduire en une cantine de distribution du maïs importé d’Afrique australe.

En espérant bien en trouver. Car, en allant en Zambie et en Afrique du Sud, la délégation de Kamerhe ignore certainement qu’une telle exploration a déjà eu lieu depuis trois ans. Elle était menée par les gouvernements provinciaux des provinces du grand Katanga dans le même but de résorber la crise du maïs qui se pose, aujourd’hui, avec plus d’acuité. En son temps, en effet, Jacques Kyabula, Gouverneur du Haut-Katanga, avait approché les autorités de ces deux pays dans l’espoir de combler le gap de la production du maïs pour nourrir ses administrés. Il avait réussi à décrocher de la Zambie 20% de la production que ce pays avait décidé de dédier à sa province.

Aujourd’hui, la Zambie a décidé de ne plus exporter son maïs suite à la chute drastique de la production due à la désertification. Ce pays a même connu une crise, elle-même, lorsque le prix du sac de 25 Km de maïs est passé de 3 à 15 dollars en passant par 6$. Et le Haut-Katanga en subit aujourd’hui le contrecoup traduit la hausse vertigineuse de la même quantité de maïs.

Dans la même démarche, l’autorité haut-katangaise était butée à la même difficulté du côté de l’Afrique du sud suite à la désertification également. Mais ce pays présente, malgré ses grandes capacités de production aujourd’hui en chute libre, un second désavantage lié à sa production largement axée sur les OGM (organes génétiquement modifiés) que les lois congolaises prohibent.

Et pour la suite, notre excellent confrère Mulopwe Wa Ku Demba développe, sur le médias en ligne finance-cd.com, les observations suivantes qui choquent les consciences face à l’inconscience manifeste de nos dirigeants.

Absence de politiques agricoles

Un travail qui pouvait être fait par à peine 5 experts issus des ministères de l’Economie, du Commerce et de l’Agriculture. «Le problème n’est pas celui-là. Le problème, c’est la rareté de la farine de maïs sur le marché. La hausse des prix en est simplement la conséquence», explique un commerçant de Lubumbashi. Qui ajoute : «et les causes de cette rareté sont également connues : la faiblesse de la production locale et les mesures d’interdiction des exportations zambiennes vers la RDC. C’est connu de tous, et il appartient au gouvernement de trouver des solutions».

Que la RDC, avec ses 120 millions de terres arables dont 10% – soit 12 millions d’hectares – sont réellement exploitées, en soit réduite, depuis plusieurs années d’ailleurs, à compter sur la Zambie et l’Azanie pour combler ses récurrents déficits en farine de maïs, est un comble. Le pays paie cash des mauvaises politiques agricoles – ou plutôt, l’absence de politique agricole – depuis qu’il a accédé à l’indépendance en 1960. Le Congo n’est pas sujet à la sécheresse, mais est handicapé par un système de transport intérieur médiocre, qui entrave la mise en place d’un système national efficace d’approvisionnement alimentaire en milieu urbain. L’agriculture est un secteur capital pour la RDC, car elle occupe 70 % de sa population active. Mais avec un tel potentiel – capable de nourrir deux milliards de personnes selon l’ANAPI, l’Agence nationale de promotion des investissements –, la RDC est quasiment introuvable sur la liste des grands producteurs africains des produits agricoles, à la notable exception pour le manioc (30 millions de tonnes, 3ème producteur mondial, juste derrière le Nigeria et la Thailand), et la banane plantain (4,7 millions de tonnes, 1er producteur mondial). Pour le maïs, le pays traîne en queue de peloton avec seulement 2,1 millions de tonnes.

Jonas Eugène Kota

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