Bamako-Abidjan: Paris et Moscou derrière les suspicions sur les 49 soldats ivoiriens ?

Bizzare-bizzare, cette escalade de suspicion – qui ne devrait pas en être une, selon les observateurs – entre Bamako et Abidjan au sujet des 49 soldats ivoiriens arrêtés dimanche dernier au Mali. Ces soldats étaient allés prendre la relève d’un régiment des éléments nationaux de soutien (NSE), une unité  qui appuie les Casques Bleus de la Minusma, à travers une sous-traitance d’une société locale, pour la protection des installations de la mission onusienne au Mali.

C’est, en tout cas, ce que soutiennent les autorités ivoiriennes qui, depuis le début, font savoir que ces soldats font bel et bien partie de l’armée régulière. Elles ajoutent que sept missions de la même nature ont déjà été précédemment envoyées pour le même objet avec l’accord aussi bien de la Minusma, qui les utilise, et des autorités maliennes, cela en vertu d’une convention signée en juillet 2019 entre la Côte d’Ivoire et l’organisation des Nations unies.

A Bamako on soutient le contraire en avançant que ces 49 soldats sont des mercenaires envoyés pour déstabiliser la Mali. Le colonel Abdoulaye Maiga, porte-parole du gouvernement de transition déclarait, en effet qu’il a été établi « que les quarante-neuf militaires ivoiriens se trouvaient illégalement sur le territoire national du Mali (…) en possession d’armes et de munitions de guerre, sans ordre de mission ni autorisation».

A l’étai de cette thèse, le porte-parole relève que «quatre versions différentes ont été avancées par les militaires interpellés pour justifier leur présence sur le territoire malien : « La mission confidentielle, la rotation dans le cadre de la Minusma, la sécurisation de la base logistique de la compagnie aérienne Sahelian Aviation Services (SAS) et la protection du contingent allemand. » Le gouvernement malien a ainsi décidé « de mettre fin, avec effet immédiat, à l’activité de protection de la compagnie SAS par des forces étrangères ».

Un yo-yo suspect entre New-York et la Minusma à Bamako

Ces contradictions entre les deux capitales se sont compliquées avec les tergiversations émanent désormais de l’ONU sur l’identité des 49 soldats et leur rôle. En effet, alors qu’au début, les porte-parole à New-York et à Bamako reconnaissaient qu’effectivement ces soldats étaient destinés à appuyer la Minusma à travers la société SAS, une nouvelle version onusienne nie tout rapport de cette nature avec le Gouvernement ivoirien.

Selon RFI qui affirme avoir interrogé à New-York un haut responsable qui a requis l’anonymat, l’organisation mondiale n’a pas été en mesure de préciser ni le rôle exact ni le lien contractuel de ces soldats (et leur Gouvernelent) la société privée SAS, sous-traitante de la Minusma. Plus encore, la même source soutient que ces soldats ne font pas partie de la NSE et même que le contrat supposé ne donne aucune précision sur les termes de son applicabilité, même si, au nom de ce même document, sept précédentes missions du genre ont déjà été envoyées au Mali.

A quoi jouerait donc l’ONU avec ses contractions sur une question de haute importance ? De haute importance parce que les NSE querellés doivent protéger ses installations au Mali et parce que leur travail est censé s’effectuer dans un pays en proie au terrorisme. La mission onusienne se permettrait-elle donc de se tirer une balle dans le pied de manière aussi ridicule et irresponsable ?

Des mains françaises et russes derrière la cacophonie ?

Pour les observateurs, cette cacophonie et ce braquage de Bamako devrait être recherché ailleurs, dans un antagonisme entre la France et la Russie. On estime, en effet, que, d’une part, Paris serait derrière cette cacophonie onusienne pour annihiler l’appui NSE de son protégé ivoirien pour laisser les autorités malienne se dépêtrer seules. La France aurait la rancune tenace au point d’avoir décidé de ne pas laisser sans suite l’affront subi avec l’expulsion de son dispositif militaire du Mali.

Une diplomatie de la répression dont s’est souvent servi la France. Et pour garder les mains propres après avoir, toujours selon les analystes, provoqué la cacophonie à l’ONU, Paris aurait ainsi choisi de faire sous-traiter sa diplomatie répressive par la communication médiatique à travers RFI notamment. On en voudrait pour preuve les conditionnels utilisés et les sources anonymes citées par RFI et qui n’ont pour conséquence que de semer le trouble dans la lecture de la situation. Garder également les mains propres en détournant l’attention vers la rancune de Bamako contre Abidjan qui avait était parmi les meneurs dans les sanctions de la Cedao contre le Mali.

D’autre part, on avance la main russe qui profiterait de cette situation pour dégager toute implication occidentale, à défaut de mettre à mal toute la Minusma, et demeurer seul maître du terrain malgré ses dénégations de son soutien du groupe Wagner. On n’oublie pas, non plus, que, dans les mêmes conditions que le dispositif militaire français, les autorités maliennes avaient renvoyé sans ménagement un contingent danois.

JEK

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