Caddies en équilibre, taux en chute libre : bienvenue au cirque monétaire du supermarché

Sous les néons des supermarchés, le Franc congolais fait son cirque, le dollar perd la boule et les clients se bousculent pour applaudir… le taux consolateur de 23.000 FC. Dans cette grande comédie du change, les caddies valsent, les prix cabriolent et les caissières jonglent avec les zéros. Tout le monde y trouve son rôle : les gérants en prestidigitateurs, les acheteurs en acrobates, et le Franc, en vedette nationale, qui salue la foule d’un large sourire… avant le prochain numéro.

On aurait pu croire à un miracle monétaire, un exorcisme financier, ou à la résurrection du Franc congolais qu’on disait condamné à végéter dans les portefeuilles comme un billet de musée. Mais voilà qu’en deux petites semaines, le Franc national s’est redressé, tel un boxeur groggy qu’on croyait à terre, reprenant soudain des couleurs face au Roi dollar, désormais en débandade royale.

De 28.000 FC pour un dollar, on est tombé à 19.000 FC. Une chute périlleuse de 9.000 francs qui donne des vertiges aux économistes, des migraines aux commerçants et des cauchemars aux épargnants. Car, sur le papier, c’est une victoire éclatante du Franc. Dans la réalité du marché, c’est plutôt un sketch mélodramatique où personne ne sait plus qui pleure, qui rit ou qui paie.

Les « vendanges » de la Banque centrale

Depuis que la Banque centrale a décidé de faire du Franc congolais un athlète de haut niveau, c’est la valse des taux de change. Le dollar, autrefois « roi » incontesté, est désormais un monarque déchu, chassé de son trône par la politique monétaire nationale. Sauf que, dans les rues, les marchés et les supermarchés, cette révolution monétaire a l’effet d’un film tragicomique sans fin : chacun joue sa scène, mais personne ne connaît le scénario.

Le citoyen lambda, lui, découvre avec horreur que si son Franc a retrouvé de la vigueur, son panier, lui, reste anémié. Les prix n’ont pas suivi la danse. Un article vendu hier à 10 dollars — soit 28.000 FC — coûte aujourd’hui… toujours 28.000 FC. Sauf qu’au nouveau taux, cela fait environ 14 dollars ! Autrement dit, le commerçant vend désormais plus cher sans rien changer à l’étiquette.

Résultat : le Congolais se félicite de la remontée du Franc le matin, mais pleure à la caisse le soir. Il se dit patriote quand il échange ses billets verts contre la monnaie nationale, mais blasphème dès qu’il voit le prix du pain.

Le grand retour des chasseurs de Francs

Le renversement du dollar a aussi fait naître une nouvelle espèce d’agents économiques : les chasseurs de Francs. Ces stratèges de la débrouille sillonnent les supermarchés qui appliquent encore un « taux consolateur » de 23.000 FC, flairant la bonne affaire.

Leur technique ? Acheter pour 2 dollars, payer en billets verts, puis exiger la monnaie — en Francs. Jackpot ! Au lieu de recevoir 190.000 FC, ils repartent avec 230.000 FC.

Depuis, les supermarchés sont pris d’assaut et ne désemplissent plus. On ne vient plus vraiment y faire des courses, mais de la gymnastique financière. Devant les caisses, les clients font la queue, sourire en coin et calculatrice en main. Faute d’espace, d’autres errent entre les rayons, se livrant à des selfies de résistance économique, immortalisant ce moment historique où le Franc fait trembler le Roi dollar.

Quand la monnaie rit, le peuple grince

Le plus ironique, c’est que dans cette comédie monétaire, personne n’est vraiment gagnant. Le détenteur du dollar se sent volé de 9.000 FC à chaque transaction, le commerçant se perd dans les conversions et l’acheteur, lui, a l’impression de vivre dans une salle de miroirs où tout se déforme sauf la facture finale.

Pendant que la Banque centrale jubile de son exploit macroéconomique, le petit peuple, lui, jongle avec les zéros et les paradoxes. La monnaie nationale brille enfin, certes — mais c’est souvent la lumière des projecteurs sur la scène d’un théâtre où le consommateur reste le seul clown involontaire.

Et pendant que le Roi dollar, désormais exilé, se réfugie dans les poches des spéculateurs, le Franc congolais, lui, savoure sa revanche. Il parade fièrement sur les marchés, se pavane dans les supermarchés et se fait désirer dans les bureaux de change.

Mais au fond, tout le monde le sait : dans ce pays où même les miracles économiques portent des sandales trouées, il suffirait d’un éternuement du marché noir pour que le Roi dollar reprenne sa couronne… et que le Franc retourne dans son sommeil de beauté.

Entre pirouettes du Franc et cabrioles des prix, le client du supermarché devient acrobate malgré lui…

Jonas Eugène Kota

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