Projet « Métro-Kin » : Godé Mpoyi au cœur d’une vaste escroquerie

Sans base juridique claire ni capacité financière, le projet de réseau de transport ferroviaire à Kinshasa que promeut, bec et ongles, le Président de l’APK est une nébuleuse qui n’a pour but manifeste que de capter des fonds auprès des naïfs avec des complicités à tous les niveaux.

Les Kinois vont aborder, dans quelques jours, un mois d’avril de tous les enjeux pour le projet « Métro-Kin » visant à doter leur ville, Kinshasa, d’un réseau ferroviaire moderne. C’est, en tout cas, ce qu’avait annoncé Godé Mpoyi Kadima, Président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa, le 7 mars 2023 au journal parlé en lingala de Top Congo. Les travaux, ajoutait-t-il, vont débuter sur l’axe Gombe-Masina. L’entrepreneur chinois (sans le citer) en charge des travaux va réaliser une voie ferrée aérienne qui va avoir l’écartement des rails conforme au standard international, poursuivait Mpoyi.

Il prévenait aussi que des expropriations devraient également être opérées pour aménager le tracé de la voie dont il n’avait pas donné plus d’indication non plus. Dans tous les cas, assurait-il, le premier train devra être lancé sur cette voie pour la fin de l’année en cours.

Cette intervention médiatique de Godé Mpoyi avait suffi pour mettre la puce à l’oreille, déjà attentive, des observateurs et des sources introduites, pour se conforter dans la conviction d’une vaste escroquerie qu’est ce fameux projet « Métro-Kin » et dont Godé Mpoyi se fait le principal chantre et promoteur. Lui qui est pourtant législateur se comporte, dans ce cas comme dans plusieurs autres domaines de la vie de la province de Kinshasa, comme le patron de l’exécutif provincial.

Il faut rappeler que déjà sous André Kimbuta, les promoteurs de ce même projet, alors non identifié sous son appellation actuelle, l’avaient proposé à la ville. Prudent, le Gouverneur Kimbuta avait délégué une mission de vérification en Pologne d’où ces promoteurs congolais disaient revenir. Sur place, il fut constaté qu’en fait de promoteurs, il s’agissait d’une engeance de frappeurs commissionnaires, et Kimbuta classa le dossier sans suite. L’un de ces délégués en Pologne est aujourd’hui Député provincial et est littéralement tombé des nus quand il a découvert qui étaient derrière Métro-Kin.

Au commencement était un passage en force signé Godé Mpoyi à l’Assemblée provinciale

Croyant annoncer aux congolais une bonne nouvelle aux Kinois début mars dernier, Godé Mpoyi levait un coin de voile sur la vraie nature de ce projet de réseau ferroviaire qu’il avait laissé passer à l’Assemblée provinciale dans des conditions abracadabrantesques pour un économiste et fiscaliste qu’il se réclame (on dit qu’il est détenteur de 15 diplômes). C’est le même Godé Mpoyi qui, malgré toutes les appréhensions historiques sur le sérieux de ce projet et de leurs auteurs, va monter ce qui n’est pas moins d’un hold-up parlementaire à l’Assemblée provinciale de Kinshasa pour faire passer ce projet.  Au cours d’une plénière par un jour du mois de septembre 2022, en effet, le Président de l’APK escorte littéralement Amos Mbokoso, alors Ministre provincial du budget et des transports, qui vient présenter les statuts d’une société anonyme dénommée « Matro de Kinshasa » (Métro-Kin), la société qui porte le fameux projet de réseau de transport ferroviaire.

Ce jour-là, la ville de Kinshasa rentre dans l’histoire mondiale du raccordement parlementaire frauduleux avec ce débat qui, à la fois, saute des étapes et force des passages pour faire adopter les statuts au bout de quelque 2h30 d’un semblant de débat. Dans la salle de l’assemblée, des délégués des porteurs du deal orientent les interventions de la majorité des députés, intervenants à travers des messages whatsapp. Par exemple, un de ces députés, qui s’apprête à prendre la parole, voit apparaître sur son téléphone, ce message : « Oyo eloko ya petit nayo, Vieux, boma moto » (Vieux, ceci est un projet de ton petit frère, sois fair play).

« Métro-Kin », un projet sans personnalité juridique claire ni capacité financière

Sans surprise, le projet passe comme une lettre à la poste. Mais la réalité c’est que Godé Mpoyi vient de doter la ville de Kinshasa d’une société fantôme qui apporte à la ville du vent en lieu et place d’un projet digne de ce nom.

La réalité, en effet, est que, dans sa modération de la plénière, Godé Mpoyi a délibérément opéré un passage en force en ne faisant pas passer le projet par la commission Ecofin, comme de tradition, pour les vérifications d’usage par rapport aux lois et règlements. Ce faisant, Mpoyi est participé à l’occultation de la partie la plus essentielle de ce projet, notamment la vraie identité de son porteur ainsi que ses vraies intentions. En effet, si les statuts de « Métro-Kin » énumèrent les parties prenantes, à savoir la ville de Kinshasa, la SCTP et un privé dénommé Trans Connexion Congo (TCC), ils ne donnent aucune indication sur leurs détails respectifs.

A savoir, d’abord, que la ville de Kinshasa ne justifie d’aucune capacité financière pouvant lui permettre de porter un projet qui pèse au bas mot Usd 2 milliards. Surtout que la ville a maille à partir avec des banques locales pour ses nombreux découverts.

A savoir, ensuite, que la SCTP, qui est embarquée dans les statuts de Matro-Kin, n’a jamais donné son accord formel pour participer à ce projet en donnant son réseau ferroviaire de Kinshasa. Ni le syndicat, ni le Conseil d’administration n’ont souvenance d’avoir été informé d’une telle démarche. A la direction générale, seuls quelques hauts cadres, dont Gabin Lulendo, alors DGA de la SCTP, se souviennent d’avoir échangé à titre informel avec des interlocuteurs sur l’idée d’un projet de réseau ferroviaire, sans plus.

Dans tous les cas, la SCTP, propriété exclusive de l’Etat congolais, n’a jamais obtenu l’autorisation – nécessaire dans ce genre de cas – pour s’engager dans ce projet. En sorte qu’elle ne peut pas donner à ce projet flou son réseau ferroviaire au titre de sa participation.

A savoir, enfin, que Trans Connexion Congo (TCC), pivot et inspirateur du projet, est le noyau proprement dit de cette fumigation qui pose un sérieux problème aussi bien sur la viabilité que la légalité des sociétaires et leur deal. Si TCC est identifiée au Guichet unique de création d’entreprise sous le numéro 01-714-N45584Q, elle ne justifie officiellement pas d’existence légale formelle que ne peut attester que la publication de ses statuts au journal officiel.

Sans capacité financière prouvée, cette société n’avait déclaré, pour l’exercice fiscal de 2021, que 250.000 FC d’impôt sur le bénéfice et 30.000 FC d’impôt sur le revenu locatif, contre rien comme cotisation à la CNSS. Officiellement, Trans Connexion Congo affiche, sur certains documents, un capital de Usd 20.000 contre3.280.000 CDF (1.426$ aujourd’hui) au Guichet unique de création d’entreprise. De loin insuffisant pour prétendre porter un projet de Usd 2 milliards.

Le pot-aux-roses mis à jour, Godé Mpoyi désormais en difficulté

En annonçant le lancement des travaux du projet « Métro-Kin », Godé Mpoyi va donc devoir porter la responsabilité d’avoir cornaqué une nébuleuse sans aucune étude de faisabilité et qui change d’orientation à l’insu du législateur. En effet, lorsque le Président de l’APK annonçait, le 7 mars 2023, le début des travaux avec des partenaires chinois pour un réseau ferroviaire aérien, il induisait que les partenaires au projet « Métro-Kin » avaient changé, puisque les statuts qu’il avait fait passé ne mentionne aucun actionnaire chinois et la SCTP ne dispose d’aucun réseau aérien.

Le dossier reste à suivre

Jonas Eugène Kota

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