RDC/Élections 2023 : sans doute la pire des quatre cycles électoraux depuis l’indépendance

Jusqu’aux premières heures avancées de ce jeudi 21 décembre 2023, des Congolais se trouvaient encore retenus à des centres de vote pour remplir leur devoir civique lors des élections générales, les quatrièmes que le pays organisent depuis son indépendance. Les scrutins, prévus pour durer 11 heures au seul jour du 20 décembre, se prolongent ainsi sur 48 heures (le présent de conjugaison n’est pas fortuit) et promettent d’aller bien au-delà dans certaines contrées du Congo profond où ils ont été officiellement renvoyés à ce samedi.


De grappes entières des populations ont dû passer la nuit dans des centres de vote par crainte de l’insécurité nocturne sur le chemin de retour, ou tout simplement parce qu’ils n’avaient pas encore voté. Ce jeudi, jour ouvrable, nombre d’entre eux vont devoir s’offrir un jour supplémentaire pour leur reconstitution physique après la journée chômée de mercredi à cause du vote.


D’autres, plus « chanceux » et particulièrement nombreux, ont eu, à la faveur du désordre électoral, la grâce de retourner tôt à leur domicile ou de vaquer à d’autres occupations parce qu’ils n’ont pas trouvé leurs noms sur les listes électorales. Des listes réclamées de longue date, mais que la CENI avait préférer thésauriser, certainement pour demeurer jusqu’au bout dans sa logique de l’opacité du fichier électoral.
On ne connaît pas encore le sort des centres qui n’ont pas pu connaître le vote ou qui l’ont vu stopper, généralement suite à la colère des électeurs qui ont saccagé machines, bulletins de vote et autres matériels sensibles

Les chiffres du capharnaüm
En fin de matinée déjà, la Mission d’observation conjointe CENCO-ECC livrait son tout premier rapport qui traduisait cette catastrophe électorale. En effet, selon ce rapport, 31, 37% de bureaux de vote n’ont pas ouvert à l’heure lrzcie, 45,1% ont connu le dysfonctionnement des Dispositifs électroniques de vote (DEV) ; 9,8% de bureaux de vote ont été interdits d’accès aux observateurs, 7,84% ont enregistré des actes de violence dont 5,88% saccagés. La pluie a perturbé les opérations dans 3,92% des bureaux. Enfin, dans 1% des bureaux, les électeurs admissibles au vote ont été empêchés de voter.


Ce tableau n’est que partiel et ne couvre que la minorité de la situation générale car il émane de 22,1% des observateurs que la MOE CENCO-ECC a déployés dans les villes et chefs-lieux des territoires.
Ce tableau général lapidairement brossé témoigne du souk qui aura caractérisé ce jour de scrutin au terme d’un processus électoral dont le terme « chaotique » s’avère aujourd’hui trop faible pour décrire l’ensemble de la réalité. Un capharnaüm qui aura éclaté au grand jour à la faveur du peu de pénétration de la téléphonie qui a permis de révéler presqu’en temps réel tout ce qui se passait dans tous les coins de la République.
Un scandale qui éclatait à la pointe d’Uvira, aux frontières burundaises, était instantanément connus à Kakongo, aux frontières angolaises de Mbanza Kongo ; autant qu’entre le grand Nord de Dungu, en face du Sud-Soudan et les frontières zambiennes dans le Katanga, etc.
Toute la journée du 20 décembre, les internautes ont ainsi vécu des scènes capharnaümesques qui singularisaient de plus bel la RDC dans le firmament du système démocratique universellement connu. Les âmes consciencieuses se sont désormais décider d’éviter de nommer « élections » se qui se déployait sous leur regard.
Tôt le matin déjà, c’est portes et fenêtres closes que les électeurs ont trouvées à leur arrivée dans la grande majorité des centres de vote. Arrivés vers 5 heures du matin, certains, même à Kinshasa, ont dû attendre jusqu’à partir de 16 heures pour voir poindre le premier agent CENI.

Matériels transportés à dos d’hommes

Comme dans ce centre où cette femme arrivait sur une moto avec une seule machine à voter pour se retrouver hébétée et dépaysée au milieu des électeurs qui, plutôt que de s’énerver de plus bel, ont éclaté de rire. Comme d’autres centres, le reste des équipes débarquera à qui mieux mieux, à bord des taxis appelés « ketchup » ou, pour les plus nantis, du système « yango », etc.
Dans les campagnes, c’est sur les épaules ou à dos d’hommes que les matériels parviendront aux différents centres, du moins pour certains. Comme cette image d’une colonne d’homme portant des caisses noires des machines à voter, coulant à travers bois et savane pour gagner les centres de vote où les esprits sont surchauffés.
Normal alors de vivre des scènes de suspicion qui débouchent sur le saccage des centres de vote et la destruction, avec rage, des matériels sensibles.

Sans doute la pire des quatre cycles électoraux
Ailleurs, c’est « pas de bol » qui a été réservé aux qui n’auront pas vu le moindre équipement, soit parce qu’il n’est tout simplement pas arrivé, soit parce qu’il a été volé. Comme dans ce centre de Lisala où le personnel de la CENI, arrivé tôt le matin, ne retrouvé aucun des matériels qui y avaient été déposés la veille au soir. Jouant les surpris, les policiers vont se mettre à tournoyer dans la cour de l’école sans aucune solution.
C’est donc à un moment anecdotique de leur démocratie chaotique que Dénis Kadima, le spécialiste vanté des élections, aura offert aux Congolais et à l’humanité.

On ne revient pas sur ces scènes de tricherie où des candidats de l’Union Sacrée ont été surpris avec des machines à voter, des bulletins de vote et d’autres matériels sensibles de la CENI.
Ou non plus sur la poursuite de la campagne électorale sur les sites de vote, le soudoiement des électeurs pour influencer leur vote, etc.
Ces réalités et tant d’autres dégagent une conviction généralement partagée : depuis son accession à la souveraineté nationale et internationale, la RDC vient de connaître la pire de ses quatre cycles électoraux.
Jonas Eugène Kota

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